Lee Friedlander, New Orleans, 1969, de la série Self Portrait, Collection Frac Aquitaine, © Lee Friedlander, Photo : Frac Aquitaine
« Instantané 2016 invite le public sur la notion de L’habiter à travers les travaux des photographes de la Biennale et une présence artistique nomade dans différents territoires de la ville. Photographier pour se souvenir, pour penser, pour comprendre ? Et de cadrages en cadrages, regarder d’une autre façon les territoires, d’un lieu à un autre lieu. Les photographies nous montrent ce que nous avons pensé, ce que nous avons réalisé, ce que nous avons oublié – en même temps que ce que nous voyons ! Il s’agira cette année, avec le talent des artistes, de voir en quelques images les projets se former et les lieux se transformer. Cela forme notre point de vue et transforme nos idées. Je vous souhaite une agréable biennale. »
Jean-Jacques Éroles
Maire de La Teste de Buch
Conseiller Départemental de la Gironde
Si le terme habiter nous renvoie spontanément à l’idée d’occuper habituellement un lieu, de résider quelque part, nous ne pouvons omettre le fait qu’il existe des formes diverses d’occupation.
La précarité économique et la précarité des conditions de vie se caractérisent très souvent par le mal-logement : logements insalubres, inadaptés ou l’absence même de domicile personnel. Il y a l’habiter de l’homme ordinaire (avec domicile), et l’habiter de l’homme exclu (sans domicile). Alors que le premier implique une pérennité, le second suppose un état provisoire.
La condition de la personne sans abri est l’épreuve ultime de l’habiter qui doit trouver à se réaliser dans l’espace public, ou dans les lieux du système assistanciel. Quel est donc le rapport de l’être humain à l’espace qu’il habite, et qu’en est-il lorsque le seul espace habitable est l’espace public ?
Ces formes d’occupation liées à l’impermanence sont vécues également par des populations civiles contraintes à l’exode. Provoqué par les conflits armés dans le pays d’origine, l’itinérance conduit le plus souvent à des conditions d’habitat fragile et incertain. Le rassemblement et l’occupation provisoire d’un territoire, sous forme de campement, peuvent résulter également d’une nécessité portée par des revendications politiques citoyennes et contestataires.
La notion de l’habiter ouvre ainsi à une interprétation plurielle, englobant les dimensions individuelles, collectives, spatiales, culturelles, économiques et politiques.
L’habiter interroge l’appropriation d’un lieu, l’architecture, l’urbanisme, les problématiques de l’homme et de son environnement, les mutations des paysages, l’entre-deux, le devenir. L’habiter questionne la relation que le corps entretient avec l’espace, la manière dont chacun investit son espace privé avec son propre imaginaire mais aussi à travers l’imaginaire collectif, avec sa culture ou sa position sociale. L’habiter interroge la mobilité, les dispositifs de circulation, de flux, de contrôle, de surveillance, de connectivité, à l’ère de la mondialisation. L’ensemble des pratiques individuelles et collectives des lieux contribue à l’habiter.
L’acte photographique peut en ce sens être considéré comme intrinsèquement lié à une pratique de lieux. Enregistrement d’une réalité, le médium photographique nécessite la présence contiguë du photographe et de son sujet photographique. Un photographe parcourt un territoire proche ou lointain, l’appréhende, l’occupe, et en fait l’épreuve dans la recherche de son approche, de ses choix esthétiques et de son écriture.
Tout comme le photographe fait l’expérience du lieu, chacun est invité à habiter cette manifestation, à en être acteur ou spectateur, à être en présence. »
Ghyslaine Badezet
Commissaire d’exposition
Bauhaus Dessau (atelier de), Ziel, 29 octobre 1931, Collection Frac Aquitaine, © droits réservés, Photo : Jean-Christophe Garcia
Exposition « Regards »
Ces photographies expérimentales, documentaires, sociales, autobiographiques ou fictionnelles évoquent de manière sous-jacente la notion de l’habiter par la représentation d’une architecture, d’une présence dans un espace urbain, de l’occupation d’un territoire, de l’appropriation d’un espace.
Toutes révèlent directement ou indirectement des pratiques individuelles et collectives des lieux qui contribuent à l’habiter, même si l’intention première des auteurs n’est pas forcément de répondre à cette notion. L’exposition invite à parcourir une histoire de la photographie par la sélection d’auteurs et d’oeuvres emblématiques.
Depuis sa création en 1982, la collection du Frac Aquitaine a privilégié le médium photographique. L’engouement dont bénéficie la photographie au début des années 1980 se traduit par une reconnaissance de son statut d’oeuvre d’art et par la constitution d’ensembles cohérents d’artistes reconnus. Depuis, la collection du Frac Aquitaine regroupe des pratiques aussi diverses que la peinture, le dessin, la sculpture, l’installation, la vidéo, le son. Elle est emblématique de l’art contemporain de ces trente dernières années. La vocation fondamentale de ce fonds qui compte à ce jour plus de 1000 oeuvres, datées de 1929 à nos jours, demeure la constitution d’un patrimoine vivant qui permet à chacun d’approcher l’art d’aujourd’hui, avant qu’il ne subisse les distorsions du temps, ne crée un nouvel académisme ou bien ne se charge des a priori critiques de l’histoire.
Diane Arbus (Diane Nemerov, dit), Man and a boy on a bench in Central Park, New York City, 1962, Collection Frac Aquitaine, © Estate of Diane Arbus, Photo : Frédéric Delpech