© Palmeraie et désert/ France 2 cinéma
Tout a commencé avec l'annulation d'un projet au Tchad suite aux attentats. « Je crois que ce n'est pas au Tchad qu'il fallait aller faire le film, mais en France. On est alors partis sur les routes [...] et j'ai eu l'idée de prendre cette petite caravane qui pouvait s'approcher facilement des gens », nous explique Raymond Depardon. Au total, 90 couples soit 180 personnes se sont pris au jeu de continuer leur conversation devant une caméra. Aucune question ne leur est posée, rien ne vient altérer les dialogues. Le but de tout cela : enregistrer des accents, des façons de parler, de montrer pourquoi l'on vit ensemble en France. Au total, ce seront plus de 45 heures de film qui ont été recueillies avant d'être réduites à 1h23.
« Je crois que j'ai fait le film le plus féministe de Raymond Depardon », nous avoue Claudine Nougaret, avant de nous laisser jouer les voyeurs de ces moments d'intimité.
© Palmeraie et désert/ France 2 cinéma
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Nous sommes confrontés de but en blanc aux conversations. Aucune explication, pas de contexte, nous ne savons même pas ce qu'il s'est dit avant. Nous comprenons rapidement de quoi il en retourne. La situation, la conversation, fait écho à notre propre vécu. Dur, dur de rester passifs, de ne pas tenter de rentrer dans cette conversation. À défaut, nous créons notre propre conversation au sein du public : on se sent unis dans ce moment unique et intime. Qu'ils soient jeunes ou vieux, deux ami(e)s ou deux amants, malgré l'anonymat, ils ne nous laissent pas indifférents. On se sent concerné, on sourit, on rit, on est agacé parfois, on décrypte les non-dits, les sous-entendus, et au-delà des mot, le langage corporel. On se retrouve confronter à la fragilité des gens, qui nous renvoie à la nôtre. C'est comme se voir dans un miroir, même s'il ne nous montre pas directement notre reflet.
© Palmeraie et désert/ France 2 cinéma
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Parfois, nous enchaînons plusieurs conversations, tel un patchwork. Parfois, nous nous évadons, nous reprenons la route, découvrons un nouveau lieu, de nouvelles personnes. Et quand nous arrivons à la fin du voyage, on se demande seulement : « Où sont les 43 autres heures ? ». On aurait envie de toutes les voir, de tout savoir, avant de dire au revoir.
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