© Mapplethorpe
Le 1er juillet prochain, le département Photographie présentera une nouvelle vente intitulée Photographs Icons & Style qui offrira aux amateurs une centaine de photographies signées des grands noms du XXème siècle. Plusieurs ensembles provenant de collections prestigieuses seront à l’honneur dont des tirages signés Irving Penn, Robert Mapplethorpe, Richard Avedon, Horst P. Horst, David Lachapelle ou encore Albert Watson. L’ensemble de la vente, composée de 120 tirages, est estimée environ 2 millions d’euros.
Parmi les pièces majeures de la vente, retenons notamment un bel ensemble de 12 tirages réalisés par Irving Penn et Robert Mapplethorpe représentant des fleurs et provenant d’une même collection privée européenne. Si pour Irving Penn la fleur représente sans équivoque l’élégance et la féminité, elle devient pour Robert Mapplethorpe le symbole de la sexualité et de l’érotisme. La fleur perd un peu de son innocence pour évoquer l’anatomie masculine ou féminine, et le photographe nous offre une image où se confondent le nu et la nature morte. Les fleurs d’Irving Penn furent photographiées et publiées entre 1967 et 1973 dans le Vogue américain. Elles provenaient de l’état de New York aux Etats Unis pour la plupart ; les roses étaient envoyées de Londres et les tulipes de Hollande. Penn comme Mapplethorpe ont tous les deux revendiqué leur méconnaissance de l’horticulture qui leur permettait la plus grande liberté dans leurs recherches et leurs travaux, sans contrainte de devoir photographier une fleur au moment où celle-ci est parfaite. Bien au contraire, on retrouve dans les images de Penn ce « punctum » décrit par Roland Barthes (La chambre claire, 1980) comme ce point ou ce détail délibéré qui interpelle discrètement le spectateur. Il s’agit alors d’une légère brunissure sur le pétale d’une rose ou d’un froissement inattendu sur celui d’un coquelicot. Le célèbre Gingko (estimation : €200.000-300.000) d’Irving Penn fera partie de cet ensemble ainsi que le Poppy, Glowing Embers (estimation : €150.00-200.000) bien connu dans l’œuvre de Penn. Cet ensemble comprend également le Cala Lily signé Mapplethorpe (estimation : €50.000- 70.000) dont on peut admirer un exemplaire à l’exposition Mapplethorpe-Rodin au Musée Rodin jusqu’en septembre prochain.
Le travail d’Irving Penn sera véritablement mis à l’honneur dans cette vente. En plus de la série des fleurs évoquée ci-dessus, nous pouvons également mentionner la présence d’un beau triptyque qu’il réalise à New-York dans les années 1949-1950. Irving Penn exécuta son étude des nus de 1949 à 1950 en marge de son activité pour Vogue. Pendant cette période il sculpte de son œil le corps des femmes qui s’abandonnent à son modelage méticuleux et réfléchi. Dans ce triptyque, le corps anonyme se dévoile au rythme de la lumière qui vient caresser les hanches, laissant le renflement du ventre dans l’ombre, courant ensuite le long des côtes pour atterrir sur la poitrine étalée et lassive. De manière chaste et pudique Penn semble se délecter des courbes et des plis. Il nous fait découvrir la femme au-delà des canons esthétiques de l’époque – qui dominent encore aujourd’hui – et nous oblige à nous questionner sur la notion du beau en mettant en avant des corps terrestres, earthly bodies. Cette trinité se conçoit comme une ode à la féminité et à la fertilité de ce corps charnu et sensuel (estimation : €50.000-70.000).
D’Irving Penn, le département proposera enfin une très belle série intitulée Cranium qui comprend 21 tirages représentant des crânes d’animaux en voie de disparition dont une femelle gorille illustrée à gauche. En visitant le Národní Muzeum à Prague en 1985, Penn tombe sur une collection de crânes d’animaux. L’année suivante, il photographie vingt-huit de ces crânes, puis en choisit vingt-et-un dont il réalise des tirages argentiques virés au sélénium. Il considère cette technique plus appropriée au sujet que le platine, la surface lisse du tirage
faisant écho à la texture de l’os. À propos des crânes d’animaux, Penn déclare : « Une machine vivante à la structure raffinée. De solides cavités osseuses pour abriter de tendres organes, protéger des canalisations et conduits. Un mécanisme délicat de mâchoires et de dents. » Irving Penn, 12 décembre 1988. Chaque exemplaire tiré à Prague en 1986 est estimé €15.000-20.000.
Autre série importante, celle réalisée par Richard Avedon qui regroupe plusieurs tirages « vintage » qu’il a réalisés au cours des années 1950-1960, lorsque qu’il était photographe de mode. Ces photographies proviennent toutes de la même collection et sont montées sur carton avec l’inscription du tireur et des annotations du photographe. Cet ensemble appartenait à la «Famous Photography School », où Avedon et Penn donnèrent quelques cours. Un beau tirage argentique qui représente Elise Daniels en Balenciaga fera partie de cet ensemble (estimation : €25.000- 35.000), ainsi qu’un autre d’Audrey Hepburn en Yves Saint Laurent réalisé vers 1960 (estimation : €20.000-30.000).
© Richard Avedon
Grande icône de la mode, Coco Chanel sera également représentée dans cette vente avec un magnifique portrait réalisé par Horst P. Horst à Paris en 1937. Cette photographie, réalisée au platine sur coton monté sur un châssis en bois, est un bel hommage rendu à la couturière que l’on peut admirer allongée dans un canapé tenant une cigarette à la main tout en étant dans ses pensées (estimation : €20.000-30.000).
Plus contemporains, les photographes David Lachapelle et Albert Watson se sont également tournés vers la photographie de mode comme peuvent en témoigner certains tirages présents dans la vente. Parmi eux, retenons notamment une photographie réalisée par l’américain Lachapelle mettant en scène le célèbre mannequin Naomi Campbell dont le corps nu est entouré de fruits exotiques (estimation : €25.000-35.000). Dans un style plus classique, Albert Watson avait choisi de photographier Kate Moss en 1993 sur une plage de Marrakech lorsqu’elle était alors âgée de 19 ans (estimation : €10.000-15.000).
Exposition : Du jeudi 26 juin au lundi 30 juin de 10h à 18h et le mardi 1er juillet de 10h à 12h.