Yvette Troispoux née le 1er juin 1914 à Coulommiers en Seine-et-Marne, Yvette Troispoux a 19 ans quand elle engloutit ses économies, 40 frs, dans l'achat de son premier boitier, un Box Agfa, dont elle réalise les tirages 6x9 à l'eau salée. Elle prend sa première photo dans le Parc des Capucins ; un cliché qui, une fois extrait du bac, s'avère être un modèle de composition, alors qu'elle n'a jamais pris une seule leçon. Après seulement quelques mois Yvette remporte le concours de photographie en juillet 1933, organisé par la municipalité de Coulommiers. Le premier prix est un Kodak Pronto lui permettant de photographier avec plus de facilité, et notamment l'être humain pris sur le vif .
Yvette a eu deux amours : son frère mort jeune et la photographie, qu'elle pratiqua pendant ses loisirs. Parmi ses premiers portraits de famille, son frère Jean à la gare Montparnasse le 12 octobre 1936, dont elle parlait avec beaucoup de tendresse et d'émotion. Ce cliché représente la dernière fois qu'Yvette aura vu son frère : « Demandez-moi quelle est la photo dont je ne me séparerai jamais et je vous répondrai, celle que j'ai prise de Jean ». C'est alors qu'elle continuera de pratiquer la photo «en amateur», pour ne pas vexer ses parents, puis s'installera à Paris, où elle travaillera comme employée de bureau pendant quarante ans dans la même entreprise, Tréfimétaux.
En 1953, grâce à la Société française de photographie, elle découvre le Club Photographique de Paris, dit le 30x40 où chaque jeudi, un professionnel vient à la rencontre des passionnés. Elle photographie les photographes à l'occasion de leurs visites au « 30x40 », puis lors des vernissages ou des dîners. De 1947 à 1958, elle opère avec son Kodak à soufflet, puis acquière en 1958 aupès d'un ami un objectif Leica Summarit 1,5 de 50 mm puis un boitier qui lui permettent enfin d'opérer comme elle le souhaite, c'est-à-dire en lumière ambiante sans flash. La reconnaissance du monde artistique lui parvient en 1971, avec le Grand Prix du Club Photographique de Paris. Le jour où elle rencontra Agathe Gaillard fut le commencement d'une amitié qui dura jusqu'à la fin. À chaque vernissage à la galerie de son amie, ouverte en 1975, elle en profitait pour tirer le portrait du photographe exposé, d'où son surnom de « photographe des photographes ». Yvette se fondait dans la foule et avant même que le sujet ne l'ait reconnue, elle déclenchait son appareil. Gisèle Freund, Robert Doisneau, Édouard Boubat, Brassaï, Helmut Newton, et tant d'autres se sont laissés immortaliser par Yvette . Outre les portraits, Yvette Troispoux a réalisé de nombreuses images douces et nostalgiques de Paris et des bords de Seine.
Yvette était un électron libre, "un petit oiseau", virevoltant parmi les convives, prêt à saisir un sujet pour enrichir sa galerie de portraits. Pendant une cinquantaine d'années, elle a pris des photos en simple amateur sans ce soucier de la valeur marchande. Ce n'est que tardivement, en 1982, lors de sa première exposition à la galerie Odéon-Photo à Paris que le grand public découvre le travail monumental, accompli en catimini.
Elle a été désigné comme photographe officiel dans le cadre du Mois de la photo en 1992 à Paris. La même année, Yvette Troispoux est nommée Officier de l'Ordre des Arts et des Lettres ; C'est Robert Doisneau qui lui remettra sa médaille, le 5 mars 1993, à la mairie du VIIIe arrondissement.
En 2004, pour son quatre-vingt-dixième anniversaire, Agathe Gaillard, sa galeriste, avait organisé une exposition en 34 tirages, de 1934 à 2003, qui déclinait tout son travail personnel avec la lumière. On y voyait le gros chat noir du docteur, la Seine irradiée, des bambous au château de Gaillac, ou des enfants de dos hypnotisés par la mer.
Yvette Troispoux est morte le mardi 11 septembre 2007 à Paris, elle avait 93 ans.