James Welling né en 1951 - Hartford etats-Unis, l’œuvre de James Welling est découverte en France lors de l’exposition organisée par Claude Gintz, Ailleurs et autrement (1). L’artiste est alors associé à d’autres américains, tels que Barbara Kruger, Jenny Holzer ou Allan McCollum, dont les démarches, bien que sans lien formel précis, ont en commun une analyse critique des différents modes de représentation. Contrairement à ces artistes, James Welling ne puise pas ses références dans les médias, mais dans l’art, plus proche en cela d’une autre artiste présente à cette exposition, Sherrie Levine. L’un et l’autre soulignent l’impossibilité actuelle à prétendre à une quelconque originalité, toute œuvre n’étant que la citation d’autres. C’est pourquoi les séries que réalise James Welling à partir de la fin des années soixante-dix s’intéressent aux modes de production et de réception de l’image photographique, aux critères qui les déterminent, souvent conventionnels et fixes dans le temps depuis l’origine du médium. Il analyse les différents constituants du procédé photographique : opérations techniques (type d’objectif, cadrage, éclairage, pellicule, papier…), trace de l’intervention manuelle de l’artiste (draper, plier, froisser, jeter…) sur différents matériaux (aluminium, velours, gélatine, plastique…). Les différents ensembles alternent des images abstraites ou figuratives. Ainsi Gelatin Photographs (1977-1980) appartient à une série dans laquelle l’artiste a photographié sur fond blanc des morceaux de gélatine teintée à l’encre noire, sorte de référence tautologique à la photographie elle-même. Encadrées de noir et juxtaposées de façon à former un rectangle, ces images représentent une vaine tentative pour reconstituer une continuité visuelle. Avec les photographies abstraites, James Welling souhaitait questionner la perspective de la Renaissance comme avec Sans titre (Aluminium Foil) (1980-1981), où la profondeur de l’image est une nouvelle fois très ténue. Le principe de la sérialité lui permet d’éviter l’idée de la photographie comme un événement unique mais de la traiter au contraire comme, dit-il, une « structure », susceptible de générer une multitude de variations. C’est pourquoi le référent (gélatine ou aluminium) est difficilement identifiable, de même que l’échelle de la reproduction. Les œuvres existent alors dans leur seul effet de présence et mêlent ainsi une analyse des systèmes de représentation avec une interprétation de l’expérience sensible. Par exemple, Diary And Landscape (1977-1980) confronte des vues en noir et blanc de paysages sous la neige et de ciels nuageux à des extraits d’un journal de voyage écrit en 1840, période de la naissance de la photographie. On ne peut établir de lien entre les images conventionnelles de paysage et celles du journal, à la fois singulières et énigmatiques, autrement qu’en recourant à un récit fictif. On établit alors une continuité temporelle entre des référents qui ont un siècle et demi d’écart. La relation de la photographie à l’histoire est également développée dans les Architectural Photographs (1988), en référence à un architecte américain considéré comme un des plus importants de sa génération. Influencé par le style néo-roman, il n’en constitue pas moins un des précurseurs de la modernité aux États-Unis. Le choix des points de vue subjectifs sur les bâtiments veut révéler la modélisation du regard sur le monde qu’a fixée la photographie. « Mon travail reconstruit le monde qu’il représente. Le monde n’est pas l’origine mais l’effet de la photographie (2). »
James Welling est né en 1951 à Hartford, capitale du Connecticut, au nord-est de s Etats-Unis. Durant sa jeunesse en Nouvelle-Angleterre, il s'intéresse très tôt à l'art et se forme au dessin et à la peinture, en particulier l'aquarelle.
Il est alors influencé par les peintres amér icains Charles Burchfield, Edward Hopper et, surtout, Andrew Wyeth (auquel il rend hommage dans une série de paysages en couleurs commencée en 2010). Après avoir étudié à la Carnegie-Mellon University, Pittsbu rgh, il se rend à Valencia, Californie, pour étudier de 1971 à 1974 au réputé CalArts, le Californi a Institute of the Arts, où il obtient un B.F.A. puis un M.F.A. Il y étudie principalement la vidéo avec Wolfgang Stoerchle et John Baldessari, artiste conceptuel dont il fut l'assistant et qui a fortement influencé sa démarche artistique.
James Welling s'inspire alors, entre autres, des textes et poèmes de Gaston Bachelard, Charles Baudelaire et Stéphane Mallarmé, des photographies modernistes de Paul Strand, des films expérimentaux de Michael Snow et d'Hollis Frampton, réalisateur dont il lit avec intérêt les essais sur la photogra phie et le cinéma. Après avoir réalisé des photogrammes, des Polaroids et des prises de vues à la chambre technique 4x5 inch en 1975 et 1976, James Welling décide de se consacrer pleinement à la photographie, développant en autodidacte ses connaissances techniques et historiques.
Il vit à New York de 1978 à 1995, période durant laquelle il expose notamment en solo quatre nouvelles séri es d'images abstraites à la galerie Metro Pictures et se trouve ainsi associé à la Pictures Generation , un groupe d'artistes post-modern es défendus par le critique d'art et curateur Douglas Crimp, parmi lesquels figurent Barbara Kruger, Louise Lawler, Sherrie Levine, Robert Longo, Richard Prince et Cindy Sherman.
James Welling est proche de la scène arti stique underground ne w-yorkaise appelée No Wave (musique, performance, film, vidéo, arts visuels) née au milieu des années 1970 ; il s'intéresse en particulier à la musique de Glenn Branca, de Rhys Chatham et des Talking He ads. Au milieu des années 1980, parallèlement à ses œuvres photographiques − des prises de vue documentaires en noir et blanc comme des photogrammes couleurs, − il réalise des peintures inspirées de la géométrie fractale et effectue des mandats en tant que photographe indépendant pour le dépa rtement de design du Museum of M odern Art (MoMA) à New York, ainsi que chez Sotheby's.
Après sa premiè re exposition personnelle en Europe en 1987, il réalise de nombreux projets en France, Allemagne, Suisse, Autriche, Belgique et Grande-Bretagne ; dès lors, son travail artistique est exposé internationalement. Depuis 1995, il vit et travaille à Los Angeles, où il en seigne au sein du départem ent artistique de l'UCLA, University of California, Lo s Angeles. Il y développe le laboratoire couleur dans le cadre de la formation en photographie et influence plusieurs générations de jeunes artistes.
Deux vastes rétrospectives de son œuvre lui sont récemment consacrées au Cinci nnati Museum of Art dans l'Ohio (2.2. - 5.5.2013) et au Hammer Museum à Los Angeles (29.9.2013-12.1.2014). James Welling a réalisé près de quarante séries photograph iques depuis 1975 et une trentaine sont présentées dans l'ouvrage James Welling.
Monograph (Aperture, 2013) dirigé par James Crump, conservateur en chef du Cincinnati Museum of Art, avec une in terview de l'artiste par Eva Respini, curatrice associée du MoMA, et des essais de Mark Godfrey, curateur à la Tate Modern, de Thomas Seelig, co-directeur du Fotomuseum Winterthur, et de James Crump, qui propose un e analyse détaillée de l'ensemble de son œuvre photographique.