Francis Frith est un photographe français né en 1822, décédé en 1898.
Alors que la plupart des photographes commerciaux avaient un atelier sur place, Frith, ancien coutelier et gérant d'épicerie, imprimeur venu à la photographie en 1853, réalisa trois voyages en Orient (Égypte, Syrie et Palestine) entre 1856 et 1859, puis, encouragé par l'accueil enthousiaste que ses images avaient reçu en Angleterre, il ouvrit en 1859 un atelier à Reigate (Surrey) afin de produire des tirages albuminés, en planches séparées ou sous forme de livres illustrés de photographies collées. Ses vues déclinées en grands et petits tirages, vues stéréoscopiques et livres illustrés lui assurèrent renom et fortune. L'entreprise compta de nombreux employés et son champ d'activité ne se limita pas, loin de là, aux images d'Orient ni même aux photographies de Frith. Cette maison prospère continua son activité après la mort de Frith en 1898, jusqu'en 1971.
Le Times déclarait en janvier 1858, au sujet des photographies de Frith : "Elles nous emportent bien au-delà de tout ce que l'artiste le plus accompli saurait rendre sur la toile." À cette date, les grands ateliers commerciaux n'étaient pas encore installés sur place. Seules les photographies de Du Camp et de Greene avaient été éditées par Blanquart-Évrard, mais, loin de s'adresser au vaste public de tous ceux qui rêvaient de l'Orient, c'étaient des publications savantes et relativement confidentielles, même en France. Ajoutons que Frith utilise le négatif sur verre au collodion, et que la netteté des images a dû être pour beaucoup dans son succès commercial immédiat. C'était la première fois que le public avait à sa disposition des images faites pour lui sans autre prétention. La préface de Frith à l'édition de 1858 de son voyage donne le ton. À l'inverse de Du Camp ou d'autres qui lestaient leurs images d'un commentaire fait pour séduire l'Académie des inscriptions et belles-lettres, il commence en toute simplicité : "J'ai l'intention, si Dieu me prête vie, et si la publication que voici connaît quelque succès, de présenter au public, de temps à autre, mes impressions de pays étrangers, illustrées de vues photographiques. Pour débuter dans mes travaux, j'ai choisi les deux pays les plus intéressants du monde : l'Égypte et la Palestine."
Il offre au public anglais des vues parfois sans grande originalité mais techniquement très achevées. Il en vante l'intérêt avec une égale modestie : "Je suis trop profondément épris de ce splendide et lumineux Orient pour oser prétendre que mes photographies faiblement contrastées et dénuées de couleur rendent justice le moins du monde à son charme piquant. De fait, je tiens pour rigoureusement impossible de donner à l'esprit une information complète et exacte si les lieux concernés sont entièrement étrangers à l'œil. Rien ne saurait se substituer au voyage lui-même ; pourtant je voudrais procurer à ceux que les circonstances privent de ce luxe des représentations fidèles des scènes dont j'ai été témoin : aussi prendrai-je pour seul guide de ma plume l'exactitude de l'appareil photographique."
Frith n'a jamais prétendu être un artiste, mais plutôt un commerçant avisé et un technicien expérimenté. Offrant ainsi au public exactement ce qu'il demandait, il représente un chaînon significatif entre les voyages archéologiques et les grands ateliers commerciaux installés en Orient après 1860.