Alfred Stieglitz, Georgia O Keeffe, Torso, 1918, épreuve au palladium à partir d'un négatif au gélatino-bromure d’argent, Don de la Georgia O Keeffe Foundation en 2003, PHO 2003 8 8 © Musée d Orsay,
Expositions du 14/06/2017 au 24/09/2017 Terminé
Musée d'Orsay 1, rue de la Légion d'Honneur 75007 Paris France
Communiqué presseMusée d'Orsay 1, rue de la Légion d'Honneur 75007 Paris France
En écho au Festival de l’histoire de l’art 2017, qui a mis cette année à l’honneur les États-Unis, le musée d’Orsay présente dans son accrochage estival de photographies une cinquantaine de pièces américaines sélectionnées dans ses collections.
La création en 1978 du musée d’Orsay, premier musée d’art en France à avoir mené une politique d’acquisition et d’exposition dans le domaine de la photographie ancienne, s’inscrit dans les prémices de l’ouverture à la photographie du champ culturel et artistique hexagonal. Quarante ans plus tôt, celle-ci avait commencé à pénétrer les musées d’art américains en tant qu’objet de collection à part entière. L’expérience de ces institutions, de même que l’histoire de la photographie écrite aux États-Unis, offrent alors au jeune musée national à la fois un modèle et un cadre intellectuel. Conformément à sa vocation internationale, le musée d’Orsay a commencé ses premiers achats dans le domaine de la photographie américaine dès 1980, quelques mois seulement après l’inauguration de sa politique d’acquisition de photographies, soit 6 ans avant son ouverture au public. Des donations importantes, notamment américaines, sont régulièrement venues renforcer cet axe, qui a progressivement contribué à la définition de la collection elle-même. Cette dernière est aujourd’hui la collection française la plus représentative de l’histoire de la photographie aux États-Unis entre le début des années 1840 et la Première Guerre mondiale. Elle en illustre particulièrement bien les principaux moments-clés, reflets d’une évolution à la fois esthétique, technologique et dans les usages du médium, mais aussi des profondes mutations politiques, économiques et sociales qu’a connues le pays.
William Henry Jackson, Grand Canyon of the Colorado (Arizona) /
Le Grand Canyon du Colorado (Arizona), détail, 1883,
épreuve sur papier albuminé à partir d'un négatif sur verre au collodion
Paris, musée d’Orsay, don de M. Robert Gérard, PHO 1987 33 4
© Musée d’Orsay, Dist. RMN-Grand Palais / Alexis Brandt
Le daguerréotype s’implante aux États-Unis quelques semaines après la présentation officielle de l’invention à Paris, en août 1839. L’engouement pour le portrait daguerrien, qui y devient le mode d’expression privilégié des identités individuelle et collective, explique en partie le succès inégalé et persistant du procédé, qui ne disparaît qu’au début des années 1860. Il aura fallu attendre l’épanouissement corrélatif de la photographie sur papier pour constater l’émergence du paysage et du reportage comme véritables genres photographiques. La guerre de Sécession (1861-1865) en est, par excellence, le triste théâtre. Champs de bataille désolés, scènes de camps, villes en ruines... : aucun autre conflit avant la guerre de 1914 n’aura été l’objet d’une couverture photographique aussi grande.
Après le déchirement dans la guerre civile, l’heure est à la reconstruction de la nation, qui s’opère notamment à travers la conquête de l’Ouest. Initiées par le gouvernement, les compagnies minières ou de chemin de fer, les expéditions se doublent de campagnes photographiques qui seront, dès le XIXe siècle, internationalement diffusées. Elles contribueront à façonner les imaginaires, longtemps après avoir servi des intérêts tour à tour politique et militaire, scientifique, touristique et commercial. Paysagiste à succès dans cette veine, E. Muybridge s’impose au tournant des années 1870 et 1880 comme un pionnier de la décomposition photographique du mouvement. Ses travaux susciteront eux aussi l’admiration jusqu’en Europe, particulièrement dans les milieux artistiques.
Le deuxième âge technologique de la photographie est amorcé par la diffusion, dans les années 1880, des innovations liées au gélatino-bromure d’argent: procédés véritablement instantanés, matériel prêt à l’emploi et petits appareils portatifs marquent le début d’une phase d’industrialisation du médium. S’ensuivent une popularisation et une féminisation massives des pratiques, symbolisées dès 1888 par la firme américaine Kodak. La révolution de l’instantané repousse également les limites du reportage, permettant à des photographes engagés tel L. Hine de mettre l’appareil au service du mouvement social réformiste qui émerge au tournant du siècle dans le pays.
En réaction à la vulgarisation croissante de la photographie, le pictorialisme, premier mouvement artistique de son histoire, trouve aux États-Unis un terrain d’élection. Créée en 1902, la Photo-Secession en devient l’une des branches les plus élitistes. A. Stieglitz son leader new-yorkais la dote l’année suivante d’une revue, Camera Work, trois ans plus tard d’une galerie, The Little Galleries of The Photo-Secession. S’ouvrant aux influences des avant-gardes parisiennes, l’une comme l’autre accompagneront l’émergence, dans les années 1910, d’une conception plus respectueuse de l’esthétique propre à cet art mécanique : « pure» (non manipulée), « directe», la Straight Photography signe l’entrée du médium dans le modernisme.