© Pia Elizondo
«Je voulais depuis longtemps essayer de parler du rêve. Peut-être parce que j’ai une difficulté fondamentale à parler, à raconter mes rêves. La narration de ma vie nocturne m’a toujours échappée. Je ne réussis à conserver de mes rêves que quelques bribes, images en effet disparates qui se montrent sans ordre ni fil.
C’est toujours une narration parsemée de trous noirs, de perte de mémoire. C’est un songe d’oubli. Et puis, j’ai retrouvé ce texte de mon père. Une sorte de magie s’est produite. Quelque part, j’avais la permission d’être au milieu de ce tourbillon d’images décousues par l’oubli, et de dire que c’est un tourbillon insensé, et que cela aussi fait sens.»
Pia Elizondo
© Pia Elizondo
«Je rêve que j’écris ce récit. Les images se succèdent et virevoltent autour de moi en un tourbillon vertigineux. Je me vois en train d’écrire sur le cahier comme enfermé dans une parenthèse à l’intérieur du rêve, dans l’œil d’un cyclone de silhouettes qui me sont à la fois familières et inconnues, qui émergent du brouillard, se manifestent un instant, circulent, parlent, gesticulent, puis se tiennent coites telles des photographies, avant de se perdre dans l’abîme de la nuit, écrasées sous l’avalanche de l’oubli, et d’être englouties dans l’inquiétante quiétude des eaux du lac.
Dans ce lointain brumeux de l’oubli tout est écrit, et les êtres et les choses semblent enveloppés de la lenteur de ce qu’on commence à peine à se rappeler, de ce qui vient de s’éveiller à la vie renouvelée du souvenir. Sur la page du cahier où j’écris, le rêve projette, diffuses et imprécises, les images qui conservent encore la torpeur et la laxité de leur propre songe d’oubli.»
Salvador Elizondo, Elsinore, Atelier du gué, 2001.
Pia Elizondo est née à Mexico en 1963. Après des études de philosophie, elle se dévoue complètement à la photographie.
En 1994 elle reçoit la bourse Jeunes créateurs de la Fondation nationale pour la culture et les arts (FONCA), au Mexique, pour développer un projet sur la ville de Mexico qui sera largement diffusé.
© Pia Elizondo
Installée en France depuis 2003, elle y développe plusieurs projets autour de la mémoire, de l’intime et d’une nouvelle forme de narration visuelle. Son travail est représenté par l’Agence VU. Une partie de ses séries «Jungla de asfalto» et «Los pasos de la memoria» fait également partie de la collection du Fonds National d’Art Contemporain à Paris.
Depuis son arrivée en France, le travail de Pia Elizondo a été exposé en France, en Espagne, en Angleterre, en Norvège et au Mexique.
Depuis 2013, la photographe déploie un travail de prise de vue à l’aide du téléphone portable. Elle développe également depuis une année un projet sur le signe et l’espace avec une aide à la création de la FONCA.