© Stéfanie Renoma
L’héritière de la maison Renoma se met à la photo : comme avec les vêtements ce qui l’intéresse c’est raconter des histoires, créer des univers et mettre en scène ses visions.
Ainsi après des années de collaborations artistiques, Stefanie Renoma passe en autodidacte derrière l’objectif afin de récolter elle-même les images mentales qui la hantent.
© Stéfanie Renoma
A première vue, les images d’Eat my Art ont une forte charge érotique cependant ce qui s’y joue est bien au-delà. Il s’agit d’explorer ici tant notre rapport affectif à la nourriture que le rapport physique à ce qui nous alimente.
Dans l’aventure Eat my Art, Stefanie demande à ses modèles de se mettre en danger : souvent, elle s’enferme seule avec eux et tourne autour jusqu’à parvenir à l’instant prégnant qui cristallise tout le rapport de ceux-ci à l’aliment mis-en-scène. Non sans rappeler l’univers du photographe Guy Bourdin qu’elle admire, les images de Stefanie interpellent par une forme de sexualité frontale et froide. Sous le vernis sulfureux des images d’Eat my Art, les chairs luisent d’un éclat cadavérique, la jouissance toujours nous échappe, l’extase de surface reste inaccessible. Une tension s’instaure alors entre l’apparente chaleur des images et le reflet glacial qu’elles nous renvoient.
Ainsi, Stefanie revisite à sa manière Le Jugement dernier du peintre Jérôme Bosch. Armée de son appareil, elle compose sa propre toile, surplombant tour à tour ses modèles, elle immortalise le repas du condamné. Le châtiment est ici rendu par l’aliment-poison, à la fois désir de vie et promesse de mort.
© Stéfanie Renoma
Comme les dieux de l’Olympe qui se repaissent du fumet des mets qui leur sont sacrifiés, Stefanie se délecte de ce que ceux-ci inspirent aux autres : excitation, extase, sentiment de plénitude, écœurement, dégoût… Les modèles mangent physiquement et à leur tour ils sont dévorés par l’objectif. A travers ces mises-en-scène, c’est son propre rapport à ce qui la nourrit qu’elle examine. En filigrane, ne voit-on pas apparaître une sorte de culpabilité ? En y regardant de plus près, les modèles sont malmenés et assujettis à une austère communion culinaire… Dominés et punis, ils sont poussés à bout. C’est peut-être alors que l’on peut pressentir la violence et le rejet provoqués par les denrées imposées : celles-ci se voient éparpillées, disloquées, écrasées, croquées, avalées puis recrachées… Quelque chose de chaotique est à l’œuvre, ces images hurlent un refus de la nourriture, de l’ordre établi : la tablée dominicale est envoyée valser avec violence, « Non je ne finirai pas mon assiette, allez vous faire foutre », nous crie Stefanie.
L'artiste vous invite à suivre son travail sur son http://www.stefanie-renoma.com/blog/".