© Aaron Draper
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Photographier les personnes sans-abri, avec toutes les bonnes intentions du monde, reste une entreprise délicate. Aaron Draper, professeur de photographie à la Chico State University (Californie), en a tout à fait conscience. « Bien trop souvent, les photographes en quête de faune urbaine se rabattent sur les SDF. Malheureusement, cela n'apporte rien à notre compréhension de leur vie et de leur situation; cela indique seulement la place privilégiée depuis laquelle nous nous permettons de les photographier. »
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Pour prendre cette vision à contre-pied, Aaron Draper a voulu mettre les oubliés en valeur. Au lieu de « se cacher derrière un objectif téléscopique sur le trottoir d'en face », il trimballe son petit matériel d'éclairage dans les rues, et réalise des photographies de qualité professionnelle, qu'il offre ensuite aux intéressés.
« J'ai eu l'idée du projet Underexposed après avoir passé plusieurs heures à enlever la moindre ride sur le visage d'un client. Ce jour là, j'ai quitté mon studio caméra en main, avec l'intention ferme de photographier quelque chose de différent (...) En conduisant dans la ville, mon attention s'est tournée vers les SDF. En ralentissant pour les regarder, j'étais fasciné par leurs visages, auxquels les années passées dans la rue avaient donné des textures si particulières. Je me suis dit qu'ils feraient des portraits magnifiques. »
(Voir l'interview accordée par le photographe à diyphotography sur: http://www.diyphotography.net/photographer-sheds-light-on-homelessness-with-incredible-portrait-series/")
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Mais certains internautes ont estimé l'approche superficielle, et mis en doute la dimension sociale du projet, en insinuant notamment qu'Aaron Draper profitait des sans-abri pour son bénéfice personnel. Le 27 juillet, le photographe s'est donc expliqué sur le même site:
« Depuis environ une semaine, le projet s'est diffusé de manière exponentielle, et les photos ont été retransmises sur plus d'une centaine de sites web (Underexposed est en cours depuis 5 ans, NDLR). J'ai remarqué un certain nombre de commentaires négatifs concernant le projet et l'approche que j'avais définie (...) Certaines personnes disent que j'exploite les SDF dans un but égoïste, ou que j'essaie de dissimuler leurs problèmes sous un style plus commercial. Or, je n'ai jamais été payé pour ces portraits, ni essayé d'obtenir la moindre compensation. J'ai utilisé des centaines d'heures et des milliers de dollars de ma poche pour photographier les SDF. Quand je trouve un modèle qui semble intéressé, je lui parle d'abord et j'écoute son histoire. J'offre ensuite 1$/minute pour le photographier. Puis, je lui demande de signer une autorisation. Les SDF apprécient particulièrement le fait que je leur demande une permission écrite avant de les photographier. Enfin, j'imprime leur photo et j'essaie de les retrouver dans la semaine pour la leur montrer. C'est le moment que je préfère, parce que mes modèles sont souvent émus en découvrant leur beauté sur les photos. (...) L'étape finale consiste à impliquer les agences d'aide aux sans-abris. Sachant que ces agences n'ont pas les fonds suffisants pour engager des photographes commerciaux dans leurs campagnes de sensibilisation, je leur fait don des images. »
Voir: http://www.diyphotography.net/photographer-sheds-light-on-homelessness-with-incredible-portrait-series/"
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Si une telle déclaration permet d'effacer les soupçons des plus sceptiques quant aux intentions du photographe, elle ne résout nullement la question de savoir si la démarche « commerciale », à cheval sur le studio et la rue, est à même de révéler la réalité quotidienne des sans-abri.
Source:http://www.diyphotography.net/photographer-sheds-light-on-homelessness-with-incredible-portrait-series/"