© Gérard Rondeau
Expositions du 15/4/2015 au 14/6/2015 Terminé
Maison Européenne de la Photographie 5, 7 Rue de Fourcy 75004 Paris France
« Gérard Rondeau est photographe. C’est certain, puisqu’il se sert d’appareils photographiques et ses œuvres sont des tirages sur papier, en noir et blanc. En dit-on beaucoup plus quand on le définit par ce mot ? Il est permis d’en douter.Maison Européenne de la Photographie 5, 7 Rue de Fourcy 75004 Paris France
(…) L’une de ses particularités les plus flagrantes est qu’il va et vient sans cesse entre différentes façons de “faire de la photo”, ne se borne à aucun genre, échappe aux classements. On imagine combien cette singularité peut déplaire aux amateurs de tiroirs. Combien ils préfèreraient qu’il s’en soit tenu à un type d’images ou un autre sans aller voir ailleurs et que, surtout, il en soit resté à la “pure” photographie. Qu’il soit un photoreporter de guerre et rien d’autre. Qu’il soit un portraitiste et voilà tout. Mais Rondeau fait le contraire. Non de façon délibérée, par provocation brutale ou goût de la négation ostensible ; mais parce qu’il ne peut pas faire autrement et parce qu’il ne voit aucune raison pour s’interdire de partir d’un côté, d’un autre. Dans son œuvre se côtoient bord à bord des fragments d’autobiographie, des récits de l’histoire contemporaine, des traces d’histoires plus anciennes et des réflexions sur ce que c’est que voir et se souvenir. Ces éléments peuvent être joints ou disjoints – joints le plus souvent. Il est naturellement possible de les considérer chacun isolément mais ils s’éclairent les uns les autres.
Ainsi opère Au bord de l’ombre. Ce n’est ni le catalogue complet de ses travaux, ni une série close sur elle-même, mais un arrangement d’œuvres qui ont été exécutées à des années de distance, dans des circonstances et des lieux variés, et que Rondeau dispose en un certain ordre. Cet ordre est celui de leurs relations et de ce que ces relations suggèrent. Il se dispense de la chronologie, cette commodité. Il opère par montage, que ce soit dans l’exposition ou dans l’ouvrage qui l’accompagne. Il procède par vis-à-vis et juxtapositions. (…) Au regardeur de tendre des fils entre elles et de comprendre ce qui lui est indiqué de façon à la fois logique et elliptique.
Sur le dos d’une femme nue assise sur un lit, Rondeau a écrit ces mots pris à Roger Gilbert-Lecomte : “Regarder à se crever les yeux, à éclater le crâne, avec les yeux de derrière les yeux, de derrière la tête, comme un aveugle avec un grand cri lumineux (…).” Les yeux de derrière les yeux : on ne peut pas mieux dire.»
Philippe Dagen, février 2015