© Philip Lorca DiCorcia
Musée de la photographie de Charleroi Avenue Paul Pastur, 11 6032 Mont-sur-Marchienne Belgique
Une affaire de famille. La photographie dans les collections de Stéphane, Rodolphe et Sébastien Janssen
Après «Portrait d’une collection» de l’IDEA (Intercommunale de Développement Economique et d’Aménagement du territoire de la région de Mons) présentée en 2006, le Musée de la Photographie poursuit l’exploration et l’accueil de collections photographiques, privées ou publiques, en Belgique ou à l’étranger. L’exposition «Une affaire de famille» témoigne des choix d’une lignée de collectionneurs et s’inscrit dans le cadre des 25 ans de la Galerie Rodolphe Janssen. Depuis deux générations, Stéphane Janssen, le père, Rodolphe et Sébastien, les fils, perpétuent cette passion de l’art initiée par les grands-parents Solvay-Janssen, en rassemblant avec constance et méthode des œuvres d’artistes belges et internationaux… tableaux, peintures, installations, sculptures mais aussi photographies. Trois collections de galeristes, trois collections parallèles, sans mimétisme, se distinguant et se recoupant parfois, témoignant de lectures de l’art distinctes mais aussi d’un appétit de découvertes jamais apaisé. Le Musée de la Photographie s’est plus spécifiquement intéressé aux photographies des collections en sélectionnant quatre-vingts clichés de grands noms de la photographie dont Thomas Ruff, Andreas Gursky, Cindy Sherman, Philip-Lorca diCorcia, Stephen Shore, Diane Arbus, Sam Samore, Lee Friedlander, Andres Serrano, Richard Prince, Joel-Peter Witkin… une sélection effectuée en étroite collaboration avec les collectionneurs.
L’histoire des collections Janssen ne se résume pas à une affaire d’argent et de famille, elle est surtout celle de rencontres passionnées entre des artistes et des hommes animés par la volonté de comprendre l’art dans sa mutation et de partager leur passion.
Cette «affaire de famille» dépasse de loin le cadre familial pour s’étendre aux collectionneurs dont bien souvent ils ont suscité la vocation.
Les collections de Rodolphe, Sébastien et Stéphane Janssen… une fantastique histoire de l’art et de la photographie.
Charles Paulicevich
VARIATION. «Cet ouvrage est un tissu de mensonges. A Bruxelles, il pleut.»
A première vue, le travail de Charles Paulicevich frappe par la diversité des sujets abordés, mais en même temps par la singularité de son écriture qui incite à une investigation plus approfondie. De cette constellation colorée se dégage alors nettement une thématique générale : les formes contemporaines de la séduction et de l'artifice, la théâtralisation du quotidien, les codes du spectacle ordinaire, l'esthétisation des apparences. Ses photographies, cependant, ne cèdent pas aux charmes factices des situations choisies (concours de beauté pour animaux, salons de l'automobile ou de l'érotisme, champs de foire, publicité, boîtes de nuit, fêtes et manifestations sportives, etc.). Elles échappent par là-même à la banalité – devenue aujourd'hui convention stylistique –, refusent l'anecdote et l'ironie. Pour montrer la vulgarisation organisée de la séduction, elles délaissent tout esthétisme complaisant.
Subtil décalage, parmi d'autres, dont se joue Charles Paulicevich, bien conscient de la faculté de conversion intrinsèque à son médium. Il ne s'agit pas de transformer les paillettes et les chromes flamboyants en rutilances photographiques, mais d'affirmer le processus d'altération. Les motifs, pourtant, et ce malgré leur hétérogénéité, participent de l'opération procédurale : ils affirment les images en tant que telles alors qu'elles cristallisent le monde en train de se faire représentation généralisée. Chaque photographie est un tour de passe-passe : la transformation du réel pourtant iconisé à outrance en une image qui semble lui échapper. (…)
© Charles Paulicevich
Son mode opératoire est aux antipodes de la conception sérielle et pourtant ses images fonctionnent avant tout ensemble, sans jamais céder à la narrativité. Elles s'enrichissent d'une contextualité sans cesse renouvelée, non par le discours mais par les proximités que nous manions tous deux depuis des années, avec un plaisir jamais démenti. L'interchangeabilité des images légitime tous les phrasés, dans l'acception littéraire ou musicale du terme, toutes les variations, pourvu que les enchaînements soient rythmés. La suite s'avère interprétable à merci, les mouvements se font et se défont au gré d'une conversation ou d'une nouvelle intrusion. Le travail, qui se nourrit du doute et de l'ambivalence, active la participation et l'artiste veut confronter, à la forme éphémèrement figée de l'exposition, celle d'une présentation qui n'aurait aucun déroulement arrêté, mais laissé aux associations ludiques et signifiantes du regardeur. Qu'il puisse rejouer la partition afin que la lecture reste définitivement ouverte, que la mise en scène du réel contemporain soit chorégraphiée par la pensée spectatrice.
Le titre, déjà, dénote cette idée. En musique, une variation consiste en un «procédé d'improvisation ou de composition qui entraîne la transformation d'un élément musical, repris sous différents aspects, mais toujours reconnaissable». Mais il désigne bien sûr le projet de Charles Paulicevich dans sa globalité : la variation signifie aussi l'écart, ici photographique – le processus –, ou le changement d'aspect et dans la manière d'être – qui touche à la thématique, en définitive intimement liée à la nature même du médium.
Extraits du texte de Catherine Mayeur, commissaire de l’exposition, à paraître dans la revue Photographie ouverte 162.
Cette exposition bénéficie du soutien de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de la Loterie Nationale, de Hahnemühle et du cinéma Le Méliès à Saint-Etienne.
«L’échappée belle» - Albums de famille 1870-1980
Le Musée de la Photographie présente une sélection de sa collection d’albums de famille. Constituée au fil du temps d’achats ciblés, de dons d’anonymes ou de privés, la collection du musée comprend quelque 235 albums dont 34 livreront leurs secrets pour l’occasion. C’est au milieu du 19e siècle que l’album de famille voit le jour. Témoin des moments heureux pour les générations futures, il se révèle être un concentré positif de la mémoire d’une famille et jouit de cette particularité de pouvoir se poursuivre dans le temps, recomposé par des mains multiples.
Tout mauvais souvenir pouvant dès lors se trouver écarté d’un album et toute personne «exclue» subir la manipulation parfois grossière d’une élimination symbolique par le simple fait d’un grattage.
L’exposition met en lumière autant d’approches de moments heureux car l’album de famille, quoi qu’on en pense, ne se limite pas au seul cercle intime. Il peut se construire autour d’une thématique (paysage, femmes artistes, reproductions de tableaux…) suivie au fil des années. Il peut aussi constituer un merveilleux écrin pour abriter les photographies d’un tiers… modèle féminin, beauté exotique ou encore être le réceptacle de documents exceptionnels et inédits sur les grands rassemblements sportifs (les jeux olympiques et les courses cyclistes) ou les conflits qui ont traversé l’histoire (la Première et la Seconde Guerre mondiale).
Enfin, l’album de famille peut aussi être l’expression d’une dimension poétique grâce à un travail d’écriture, de mise en couleur. On assiste alors à un habillage délicieux et surprenant de l’image.
«L’échappée belle» - Albums de famille, une belle découverte de quelques joyaux de la collection du musée datés du 19e siècle jusqu’aux années 1970-1980.
Photographes Divers
Photos © Charles Paulicevich, Photographes divers
Vignette © Philip Lorca DiCorcia
Musée de la photographie - Centre d'art Contemporain de la Fédération Wallonie-bruxelles http://www.museephoto.be/