Eric Hattan
Galerie Fernand Léger 93 avenue Georges Gosnat 94200 Ivry-sur-Seine France
Depuis 2005, la bourse d’art monumental d’Ivry a laissé la place à un cycle d’événements sur la place de l’art dans l’espace urbain, qui prennent en compte les évolutions de l’imaginaire et de la pratique de la ville. En2009, Urban Ping Pong propose à Didier Courbot, Eric Hattan et aux commissaires du projet Tool Box de mettre en avant ces nouveaux rapports entre les artistes et la ville.
Dans La cité à travers l’histoire, Lewis Mumford décrit l’histoire de la ville comme celle de structures en expansion, semblables à des systèmes organiques. Il décrit les formes mais bute sur les fonctions. En effet,
La ville consomme et épuise les images en dissipant toute tentative de maîtrise. On est passé, par exemple,de la notion d’aménagement à celle de mobilité, qui modifie la perception des distances et la composition urbaine. Au contact de cette ville, qui s’avance avec ses détours et ses recoins, ne délimitant plus autant les usages, les artistes contemporains rebondissent avec des oeuvres qui redéfinissent les cadres, les contextes d’énonciation. Le spectateur est extrait de son quotidien et les oeuvres rendent possibles de nouvelle formes d’être ensemble. Dans l’espace public, sans sens commun prédéfini, on passe de l’art de la statuaire, qui distribuait places et représentations, à un art qui interfère dans un temps qui sépare des pôles (commerciaux, de loisirs etc.).
Pour Didier Courbot, tout espace contient un paysage. Qu’il répare un trottoir, ou organise la migration clandestine de moineaux parisiens à Rome… ses actions éphémères déplacent ce que l’on sait de la ville. A Annecy, il a conçu une place qui, telle un palimpseste, contient les récits qui ont précédés à sa livraison. Il ne cherche pas à ajouter des oeuvres à la ville, celles-ci devenant le moyen d’en approfondir la permanence. Pour Urban Ping Pong, Didier Courbot organise, dans les salles du premier sous sol du centre d’art, un espace de déambulation qui offre au visiteur différents temps urbains, où l’on peut notamment glaner à travers les grandes métropoles ou observer la maquette d’un projet de jardin.
Que ce soit dans sa pratique de la sculpture, de la vidéo ou par ses interventions éphémères dans l’espace public ou privé, Eric Hattan cherche subtilement, et non sans malice, à modifier notre perception. En perturbant légèrement notre environnement, il provoque des écarts entre notre perception et notre représentation.
Dans l’espace d’exposition, il tente de stimuler l’attention du spectateur et l’invite à porter un regard nouveau sur la réalité qui l’entoure. En investissant la grande salle du centre d’art, Eric Hattan cherche à en renverser la monumentalité. Il propose d’y retrouver le lien avec la rue, deux niveaux au-dessus et d’y présenter notamment son hommage à David Hammons.
Le projet Tool Box est à la fois une exposition et son catalogue. Conçue par l’association Entre-deux avec la complicité de Ghislain Mollet Viéville et Christian Ruby, Tool Box présente quatre-vingt quatre oeuvres que le visiteur peut activer dans les lieux publics selon des temporalités et modalités différentes. Pour cette exposition, Tool Box est présenté sur un dispositif conçu par les architectes Benjamin Avignon et Saweta Clouet, installé dans un espace de circulation du centre d’art. Chaque visiteur forme lui-même son catalogue “boîte à outils”.
En invitant deux artistes qui intègrent le paysage urbain dans leur pratique, l’un, paysagiste de formation, qui déploie dans la rue comme dans l’exposition les indices d’un autre paysage en creux, ou l’autre qui, à la façon d’un arpenteur, relève les signes petits ou grands de transformations spatiales en cours, cette exposition se projète comme une extension de la ville. De même, en proposant une nouvelle diffusion de Tool Box, l’association Entre-deux met à disposition des oeuvres au centre d’art, telles des d’outils pour travailler l’espace public. Où se trouve la ville / une fois franchit le seuil / un rebond.
Emmanuel Ropers