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La photographie de mode a sa propre rhétorique, celle du vêtement image dixit Roland Barthes qui précisait, dans son analyse sur le système de la mode, que c’est la femme qui est en acte et non le vêtement.
Toute l’histoire de la photographie de mode est marquée par cette question de la présentation du vêtement, au travers de laquelle s’inscrit aussi l’image fluctuante, virtuelle et imaginaire du corps féminin. La mode est censée représenter une force émancipatrice pour toutes les femmes.
C’est l’univers fantasmatique de la séduction et de la beauté que véhicule la photographie de mode. Entre les deux guerres, la mode s’inspira largement des innovations apportées par les avantgardes picturales.
Pa ris est le centre incontesté de la Haute Couture. Dans les magazines de mode, en France, c’est le dessin qui occupait initialement la part la plus importante. Mais progressivement la photographie va s’imposer allant jusqu’à détrôner le dessin dans les années 40.
L’innovation, au même titre que l’originalité, sera cultivée dans toutes les tentatives créatrices associées à la promotion de l’habillement féminin.
Dans l’emploi de la couleur, le domaine de la mode sera précurseur.
La plupart des photographes travaillaient avec des positifs directs, kodachrome (à partir de 1936) puis ektachrome.
Pour Edward Steichen, le photographe de mode surveille la construction de l’image - ses lumières, ses ombres et ses lignes. Les exigences spécifiques d’une photographie de mode : la distinction, l’élégance et le chic. (E. Steichen “un photographe de mode”, Vogue, 12 oct 1929).
Les États Unis d’après guerre sont le centre principal de la création de photographie de mode. C’est dans ce contexte, dans la décennie 40-50 que Erwin Blumenfeld et George Hoyningen- Huene, réalisent les ektachromes originaux grand format (20 x 25 cm) pour les magazines de mode concurrents Vogue (USA) et Harper’s Bazaar présentés.
Blumenfeld et Hoyningen-Huene sont deux grands photographes autodidactes qui ont su s’imposer dans le domaine de la mode, dans un style très différent.
Blumenfeld privilégiant l’expérimentation, le style graphique, original et saisissant pour célébrer l'Éternel Féminin alors que Hoyningen Huene, lui, fête la beauté selon l’idéal classique antique, optant pour le style néo-classique.
Tous deux ont travaillé pour les mêmes magazines Vogue parisien et Harper’s Bazaar (en même temps de 1941 à 1944) qui présentaient les dernières créations des couturiers.
Harper’s Bazaar avait alors comme rédactrice en chef Carmel Snow et Alexey Brodovitch comme directeur artistique.
Chaque mois, le choix éditorial du magazine mettait en lumière un photographe auteur.
À la fin des années 30, c’est dans la mode, la publicité puis le reportage que la couleur se répand chez les professionnels.
La plupart des photographes travaillaient avec des positifs directs - kodachrome (à partir de 1936) puis ektachrome - qui nécessitaient une maîtrise parfaite du travail en studio et de la prise de vue.
Ces ektachromes étaient parfois considérés par les photographes comme une étape vers l’impression.
Des photographes de mode tels que Cecil Beaton ou Irving Penn lui donne ses lettres de noblesse.
La couleur suscite néanmoins le débat : sa valeur esthétique par rapport au noir et blanc? A son arrivée en Amérique, la couleur était une gageure pour Blumenfeld. Il avait vu des kodachromes en Europe. La majeure partie de son travail pour Harper’s Bazaar était en noir et blanc mais la couleur l’intriguait et il était tout à fait déterminé à maîtriser ce nouveau langage. Il décide donc, à son retour à New York en 1941, de se tourner vers la couleur pour satisfaire la demande des magazines notamment Vogue, Harper’s Bazaar, Life, Look, Cosmopolitan. Il parvient à maîtriser la couleur et en fait l’articulation de ses images.
Vogue aimait paraître comme le pionnier de la photo couleur et se vantait des prouesses réalisées par ses photographes dans ce domaine.
Pour Blumenfeld, la peinture est un référent. Il parle de Vermeer comme de l’inventeur de la photo en couleurs, pour signifier que la gamme de couleurs de Kodachrome était très proche de celle de la palette du peintre(…). Il dit que le principal secret de Kodachrome, c’est qu’il ne faut pas travailler avec des couleurs, mais avec des lumières colorées.
Blumenfeld prenait grand plaisir à ignorer les règles conventionnelles de la couleur.Quant à Hoyningen-Huene, il ne se montra pas aussi attaché à la couleur que Louise Dahl Wolfe ou Anton Bruehl.
La photographie en couleurs n’a eu d’impact réel que dans la mesure où elle pouvait être imprimée dans les publications de presse en trichromie puis en quadrichromie. C’est dans le courant des années 30 que les magazines commencent à imprimer en couleurs, créant ainsi une demande de clichés. On a ainsi au moins deux sortes de photographie en couleurs : un original, sur support photographique, et sa version imprimée.