L'Alizé 90 rue Commandant Challe 29490 Guipavas France
D’une nuit l’autre, d’une ville l’autre… Dans la haute insomnie de la mégapole, éclaboussée de lumières imprenables comme autant d’îlots de solitude, un coeur bat, fragile, humain.
Seule à son balcon, une fine silhouette, rouge, plaquée contre la toile des gratte-ciels et du ciel atone. En suspend au-dessus de la ville, une femme prise dans une cage de verre. Solitaire encore, une autre figure blottie dans l’intimité de sa chambre... Il y a quelque chose d’inaccessible dans leur rêverie silencieuse. Comme si la nuit les rendait à elles-mêmes.
Ces « Vues de nuit » sont autant de fenêtres ouvertes. Sur le dehors. Sur la nuit, l’autre nuit, n’importe quelle nuit, comme si aucun jour n’était à venir. Sur la ville vorace, tentaculaire, inhumaine, c’est-à-dire sans limite, infinie. Sur le dedans aussi, l’intérieur, le songe, sur soi-même, sur le silence de la solitude, comme une calme souffrance.
[...] Chaque « vue » est le miroir tendu de notre conscience. Un miroir qui nous guette, sans sommeil. Dans le silence avare qui épie et dans le convoi des nuits, d’une « vue » à l’autre, c’est toujours la même quête obsessionnelle : ce qu’il reste de l’homme post-moderne, un noyau dur de solitude, qui résiste et s’éprend de la grande nuit.
On voudrait détourner le regard, faire taire le silence. Et pourtant, on reste hypnotisé par les lumières aveuglantes, promesses de vie, et par notre double fantomal, si près et si loin de nous.
Le jour va tout éclairer et tout faire disparaître. Attends, quelques instants encore au bord de la fenêtre, dans ce dénuement qui est une plénitude.
Virginie Luc (extrait de « Des instants hors du temps »)