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Les photos de Nathalie Mohadjer ont été prises dans des camps de réfugiés plus de 10 ans après la guerre des Balkans. Le titre de la série vient de la traduction en turc du mot Balkan qui, littéralement, comprend les mots « sang » et « miel ». On y voit des familles de fermiers qui ne survivent que grâce aux dons alimentaires. La pauvreté, les drogues, le déplacement culturel et ethnique provoquent instabilité et discorde.
« La guerre dans l'ex Yougoslavie s'est terminée en décembre 1995 et il y restait encore une centaine de camps de réfugiés proches de la ville de Tuzia. C'est dans celui nommé Grab Potok que Nathalie Mohadjer a pris les photographies réalisées dans sa série « Blut + Honig » (sang + miel) pendant le mois de décembre 2004. Cinquante personnes s'entassaient dans chacune des deux maisons en bois du camp. Le gouvernement a ensuite fermé Grab Potak à l'été 2005 et ses habitants se sont dispersés dans d'autres camps de Bosnie.
Nathalie Mohadjer a voulu rendre témoignage des restes de cette horreur passée car c'est à notre sens une des significations majeures de la photographie que de baliser la mémoire sous forme de documents vivants de ces identités en formation, qu'ils soient heureux ou malheureux. Cette identité est toujours recherchée et en mutation constante, dans ses égarements elle entraîne un positionnement de rejet de l'autre qui devient « l'ennemi intime » et provoque le génocide dans sa dimension collective.
Dans un style cru, non dénué d'une esthétique du dépouillement et de la mise en espace, Nathalie Mohadjer décrit avec sensibilité, et parfois tendresse, ces abandonnés de l'après guerre réalisant un témoignage, remède contre l'oubli qui remplit parfaitement la fonction documentaire de la photographie, sans en exclure la poésie. Utilisant les focales grand-angulaire, elle ne craint pas de s'approcher de son sujet, afin de presque nous le faire toucher de l'oeil, comme elle l'inscrit dans des compositions rigoureuses et soignées souvent circulaires, où un punctum central focalise le regard et ordonne ensuite l'image.
L'ouverture sur l'homme, à laquelle Nathalie Mohadjer nous invite est à la fois limpide, et sensible et nous rend proche notre « prochain ». Ses personnages, boutés hors de l'histoire, sont beaux dans leur simplicité, même noyés derrière une misère digne, celle de l'utile, où l'hospitalité respire avec le rien, et où l'essentiel cruel des jeux d'enfants relance l'espérance dure de la vie. »
Gilles Verneret, Directeur artistique de Lyon Septembre de la Photographie
Nathalie Mohadjer, qui vit et travailla à Paris, a étudié l'Histoire de l'art et la Philosophie à Kassel, puis la communication visuelle à l'Université du Bauhaus à Weimar. Elle a suivi les cours de Photographie de Gabriele Rothemann à Vienne.
Elle a, entre autres, réalisé en 2008 des photos de la Place Vendôme pour Boucheron, en 2006, un reportage sur l'alcoolisme avec les ONG Caritas et Diakonie ainsi qu'en 2005 un reportage sur les camps de réfugiés avec l'ONG Snaga Zene en Bosnie-Herzégovine.