Patio de la CGT Montreuil 263 rue de Paris 93100 Montreuil France
Le 17 août 2006 à Cachan la police évacue un ancien bâtiment du Crous occupé par plus de 500 squatteurs, laissant à la rue des dizaines de familles. A l’invitation du maire PS, elles sont accueillies dans un gymnase de la ville. Entre 300 et 400 personnes ont campé dans une salle exigue du gymnase avec de nombreux enfants dont certains nouveaux nés . Le quotidien de ces familles se résume aux problèmes de logement, de pauvreté, et de précarité du fait de leur statut d’immigrées. Après avoir vécu pendant deux mois dans le gymnase, et avoir été prises en otage d’une situation qui les dépasse, et dont les enjeux étaient très politiques, le 20 août 2006, le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy, déclare qu'il a "fait son devoir" en expulsant les quelques 500 occupants du squat de Cachan. Pendant deux mois de tractations fortement médiatisées, de violents débats à l’assemblée, d’interventions de nombreux responsables politiques, artistes, sportifs, associations, élus, syndicats et une partie de la population française qui dénoncent la "situation de détresse" dans laquelle ont été placés ces familles. Le 5 octobre 2006 un accord de principe est conclu pour le relogement des anciens squatteurs de Cachan. Le 12 octobre 2006, le gymnase est totalement évacué, les portes sont soudées et les occupants relogés dans des lieux provisoires.
Ce travail photographique est pour moi le reflet de ce qui se passe depuis des années en France. Cachan est le miroir grossissant du mépris avec lequel la France traite ses immigrés : des gens entassés dans un même lieu, des matelas si proches qu'ils laissent à peine la place de passer, aucun endroit pour s’isoler, des conditions sanitaires déplorables, des enfants malades, traumatisés par les interventions des forces de l’ordre, des hommes et des femmes allant malgré tout travailler pour des salaires de misère, la peur au ventre de se faire arrêter par la police, dans le RER ou dans la ville. Beaucoup me disaient : "quand tu sors d’un centre de rétention, même si tu habites en France depuis 10 ans, tu as l’impression d’arriver du Mali ". Le plus choquant pour moi a été l’épisode du garde meubles. Le peu de choses que ces familles possédaient; lits d’enfants, poussettes, vêtements, a été jeté en vrac dans des bennes d’un garde-meuble d'Orly. Là, j’ai vu les gens pleurer, un homme m’a dit en pleurant « mes cd, ma musique de France que j’enregistre depuis 5 ans, j’ai plus rien …"En détruisant le peu de biens qu’ils possédaient, c’était toute leur vie en France que l’on avait brisé . Ces familles se sont aussi organisées pour rester propres et dignes jusqu’au bout dans le gymnase alors qu’il n’y avait que trois douches en tout et pour tout. Le plus étonnant chez ces gens sans logement, sans papiers, subissant la ségrégation et devant faire face à d’énormes difficultés pour intégrer notre société, restait leur grand optimisme face à l'avenir.