Chambre à part 27 rue Sainte Madeleine 67000 Strasbourg France
“Une petite valise d’objets, de lieux et de personnages servent de pièces à conviction. Tels sont les “Things & Words”, somptueux comme ce portrait de fille aux joues roses, désertés comme cette banquette d’un train, désespérants comme le décor de la Stasi, terrifiants comme les barraques des camps, les murs lamentables de la séparation, reposants comme les fleurs d’un cimetière ombragé. Un chat noir aux yeux fous donne la mesure des choses.
Les «Passagers» touchent au coeur de cette affaire puisque on ne peut séparer le marbre et la chair, qu’ on ne sait plus si l’on est construit ou déconstruit, en décomposition ou en train d’apparaître. Simplicité de la mise en scène, frontalité, inscription dans le carré, monochromie font un silence de laboratoire... Une Renaissance n’est pas loin, car enfin nous voici redevenus des énigmes après un siècle de découvertes si terribles et si inattendues que nous sommes effrayés de nous-mêmes.”
Milou, Catalogue de l’exposition à La Galerie Wozownia, Torun, Pologne, Août 2007.
Ces deux projets ont été réalisés simultanément durant la période pendant laquelle Diane Ducruet habitait à Berlin, de 2005 à 2007.
L’aller-retour entre les différents médiums (Diaporama pour “Things & Words” et image manipulée numériquement pour “Les passagers”) se fait l’écho d’une mémoire collective qui s’arrache des lieux commémoratifs ou muséaux afin de se perdre au détours de figures et de lieux du présent.
«Vider son sac c’est avouer bien des choses…Maigret trouvait dans une armoire tel parfum de fleur d’oranger qui lui rappelait l’avant-guerre ou telle odeur de naphtaline sur le manteau d’une vieille fille assassinée…Tout braconnier a ses bouts de ficelle et son couteau. Il y a plus de choses utiles dans la poche d’un gitan, que dans celle d’un ministre….Les photographes n’ont pas le nez en l’air quand ils se promènent.
Ils prennent des clichés comme on ramasse des champignons, ils mettent dans le rectangle et le carré des fragments de paysage, des têtes, des objets, des plantes des bêtes…Ils ne savent pas toujours ce qu’ils vont en faire, mais si on y regarde bien, on s’aperçoit que ces apparences sont fragmentées à l’aide des même fractions, qu’elles obéissent à des modulations qui semblent venir de la même voix. Ce qu’elles disent converge dans le regard posé. Il n’y a pas de détail en matière de style Ici on ne vous dira jamais s’il faut se moquer du monde ou l’adorer. Ce pied a l’air d’une main serrée, c’est tout un programme…Rien n’est vraiment sérieux, mais tout peut faire mal…Le féminin coriace d’une figure excessivement rose, la bouille d’un chat aux nerfs fragiles, d’autres restes, d’autres fragments, fossiles vivants ou morts d’une histoire qui n’a ni commencement, ni fin, ni morale…Une des photos les plus célèbres d’Edouard Boubat est celle d’une poule noire dans une cour de ferme écrasée par le soleil, photo prise à la volée au détour d’un chemin, sans aucune espèce de préméditation…Que reste-t-il des photographes dans nos têtes ? quatre ou cinq images qui font de l’espace à notre imaginaire, viennent se joindre à des tableaux, des plans de film, des promenades littéraires, des sensations rescapées de l’enfance et de l’amour…Tel est le va et vient de notre singularité. Les photos flottent en surface comme des débris de naufrages prévisibles, récupérées parfois quand les solitaires des îles désertes ont jurés de vivre…
Il n’y a donc pas d’image de vérité, mais entre rien et rien les étapes sont mémorables quand on sait y faire…
Milou, about « Things & Words» 2006