Fondation Henri Cartier-Bresson 2, impasse Lebouis 75014 Paris France
Saul Leiter a réalisé ses premières photographies au début des années 1940 dans les rues de New York. Ce travail fut montré au Musée d’Art Moderne de New York en 1953 et en 1957. Pendant 20 ans il continua d’arpenter les rues, et son travail fut redécouvert bien plus tard, au milieu des années 1990. Il est aujourd’hui unanimement célébré. La Fondation HCB est heureuse de présenter pour la première fois en France une rétrospective de son oeuvre couleur et noir et blanc. Saul Leiter n’était pourtant pas voué à devenir photographe. Né à Pittsburgh en 1923, fils d’un rabbin renommé, brillant étudiant en théologie à Cleveland, il décide à l’âge de 23 ans d’abandonner ses études et de s’installer à New York pour se consacrer à sa passion première – la peinture. Sous l’influence notamment du peintre Richard Pousette-Dart, il commence à s’intéresser à la photographie. En 1947, après avoir visité l’exposition de Cartier-Bresson au MoMA, il décide de devenir photographe. Il se procure un Leica et flâne dans les rues de New York, qu’il photographie dans un premier temps en noir et blanc. En 1948, il se tourne vers la couleur, et il alternera désormais entre les deux supports. En 1953, Steichen, alors conservateur en chef de la photographie au MoMA, sélectionne vingt-cinq de ses tirages noir et blanc pour l’exposition «Always the Young Stranger», puis en 1957, intègre une vingtaine de ses images couleur pour une conférence qu’il donne au MoMA : «Experimental Photography in Color». Si ses photographies de rue sont aujourd’hui l’objet de sa renommée, Saul Leiter s’est pendant de longues années illustré en tant que photographe de mode : il y consacra la plus grande partie de sa carrière - de ses débuts en 1953 dans son studio de Bleeker Street, au milieu des années 1980. En 1957, Henry Wolf, directeur artistique légendaire, publia pour la première fois ses images dans le magazine Esquire, puis dans Harper’s Bazaar. Il devint dès lors l’un des grands photographes du milieu et travailla pour les magazines de mode les plus prestigieux. Son travail de rue, plus personnel, n’a été redécouvert qu’à la fin des années 1990, grâce notamment à la Howard Geenberg Gallery (New York) qui organisa en 1993 une exposition de ses photographies noir et blanc, et à Martin Harrison, auteur en 2006 du premier ouvrage de Saul Leiter, « Early Color » (Steidl). La Howard Greenberg Gallery a depuis présenté maintes fois son travail, qui a acquis ces dix dernières années une sérieuse notoriété. La Fondation HCB présente une centaine d’images couleur et noir et blanc réalisées de 1947 à la fin des années 1960, pour la plupart des tirages d’époque - les épreuves noir et blanc ont été réalisées par Saul Leiter lui-même - empruntés à la Howard Greenberg Gallery, et à des collections privées. Les deux univers, distincts et complémentaires, sont exposés séparément. Les noir et blanc, parmi lesquelles ses premières images, ont toutes été réalisées dans les rues de New York. Elles montrent des silhouettes en transit, des ombres, visions mystérieuses et indirectes entre romantisme et film noir. En couleur, à New York surtout, mais aussi à Paris, à Rome ou en Espagne, les tons, à la fois vifs et déteints, l’absence de contours stricts, font de ses photographies des oeuvres plastiques dans l’esprit des peintres Bonnard ou Vuillard, qu’il admire. Saul Leiter a saisi un entre-deux-mondes délicat à mille lieux de la jungle urbaine qui lui servait de sujet. Un monde flottant, embué, dans une succession infinie de mises en abîmes, tendant volontiers vers l’expressionisme abstrait de ses peintures. Ses images métamorphosent la réalité pour créer un univers à la fois poétique, onirique et apaisant, sur lequel plane la douceur de la mélancolie. Saul Leiter vit toujours à New York, où il continue de peindre et de photographier, dans la plus grande discrétion.