Groom © Patrice Deregnaucourt
« Si le regardeur fait le tableau » a dit Marcel Duchamp, ce même regardeur fait aussi la photo !
Et Patrice Deregnaucourt aime ça ! Photographe depuis ses 15 ans (ils sont loin !), Patrice Deregnaucourt travaille en minimaliste.
Après une longue pratique du sténopé, des complices fabriqués de toutes pièces, c’est avec un appareil photographique tout simple qu’il « fabrique » aujourd’hui ses natures-mortes.
Son studio particulier fait un mètre carré, la lumière naturelle, sa complice, provient d’une seule fenêtre, les décors sont inventés à partir de trois fois rien.
Des « riens » qui parlent à tout le monde : un peu nostalgiques, d’une grande simplicité, austères parfois.
En deux ou trois objets et tant de rigueur, Patrice Deregnaucourt dit un monde sur chacune de ses photos.
Chacun y voit le sien !
Luc Hossepied
© Patrice Deregnaucourt
Communiqué de presse
Le 29 août 2015 la Hongrie achève la fermeture de sa frontière avec la Serbie en construisant un mur de 4 mètres de hauteur de fils de fer barbelés et l'étend ensuite à celle avec la Croatie. Depuis, la Slovénie, l'Autriche, la Serbie, la Croatie et la Macédoine ont procédé aux mêmes mesures de filtrage et/ou de fermeture de leurs frontières.
Dans des pays réputés pour leur « esprit d'ouverture », comme la Suède ou le Danemark, et plus largement en Europe, le national-populisme gagne du terrain et diffuse un discours de haine de l'autre et de repli sur soi. Depuis, l'Union Européenne a fermé la dite « Route des Balkans » et la question de l'accueil des réfugiés est au cœur de chacun des pays de l'Union Européenne.
C'est ce mouvement de repli nationaliste, plus de 26 ans après la chute du mur de Berlin, qui a été à l'origine de mon projet.
Il s'agit simplement, avec cette série documentaire, de témoigner en donnant à voir, des femmes, des hommes, des enfants, des personnes âgées, obligés contre leur gré de fuir leur pays dans l'espoir d'un avenir meilleur, même si certains espèrent revenir un jour. Pas de « sensationnel » dans mon parti-pris photographique. Juste des regards captés au fil de ce long parcours, sourires, inquiétude, angoisse, pleurs, insouciance, volonté, fierté, humanité, désespoir...
Ces femmes, ces hommes, ces enfants, cela pourrait être vous ou moi, dans nos diversités, nos faiblesses, nos espoirs, nos contradictions... Loin de tout discours moralisateur, je ne prétends pas détenir la moindre solution, mais je donne simplement à réfléchir, à débattre et à construire un avenir plus humain...
Cet enchaînement de photos retrace le long et pénible voyage des réfugiés. Il laisse paraître l’attente interminable, et les brusques départs de nuit décidés au dernier moment par les autorités sous la pluie battante qui leur fera franchir une étape supplémentaire. Un peu d'eau et à manger, des toilettes et, un spot wifi (seul point de rattachement avec les siens). Nouveau départ, à pieds cette fois, pour franchir une frontière qu'on espère la dernière et donnant enfin l'accès à l'Europe rêvée...
Cette série témoigne malheureusement, de l'amplification du mouvement de repli sur soi avec des images de la fermeture – dérisoire s'il en est – de la frontière Austro-Slovène en ces derniers jours de décembre 2015. Pourtant la photographie d'Helmut Strobl, opposant une résistance ferme, pacifique et finalement victorieuse à son gouvernement, qui conclut l'exposition, nous appelle à réfléchir aux causes réelles de ces exodes, aux responsabilités qui sont les nôtres dans ces tragédies humaines. Elle nous rappelle à notre simple devoir d'humanité...
Alain Thirel-Dailly
© Alain Thirel-Dailly