© Michel Eisenlohr
Pays d'art et d'histoire des vallées Roya et Bévéra 3e pavillon des Écoles, Bd Jules Ferry 06380 Sospel France
Le patrimoine militaire est une des composantes architecturales les plus significatives de cette zone frontière. Afin de renouveler le regard porté sur ces « gardiens des cimes » qui jalonnent les montagnes, le Pays d’art et d’histoire/ADTRB Culture avec le soutien de la Direction Régionale des Affaires Culturelles a passé commande au photographe Michel Eisenlohr d’un reportage artistique dédié au patrimoine fortifié des vallées. Pour cette commande, réalisée entre septembre 2015 et mars 2016, carte blanche est donnée à l’artiste qui propose sa vision de ces « gardiens des cimes » dont les murs respirent encore la mémoire de ceux qui les ont bâtis. Un choix qui convient parfaitement au photographe, dont le travail aux multiples facettes lui offre une grande liberté artistique, loin de toute école stylistique. Il parcourt les sites d’altitude dominant les vallées afin de réaliser une série de clichés diurnes et nocturnesur ce patrimoine exceptionnel. Une trentaine de ces photographies seront exposées en extérieur à partir du 9 juillet 2016, réparties entre les communes de Tende et Sospel, aux deux extrémités du territoire labellisé.
© Michel Eisenlohr
« Si l’acte photographique de lieux patrimoniaux peut de prime abord être un outil documentaire, voire d’inventaire, il me semble évident lorsqu’onfait appel à un regard d’artiste que cet acte doit dépasser cette fonction commune pour tendre vers une approche plus interprétative. C’est cette démarche que je défends au fil des sujets depuis une quinzaine d’années et dans laquelle j’ai mené ce reportage intitulé « Gardiens des cimes ».
Initié par le Pays d’art et d’histoire des vallées Roya et Bevera / ADTRB Culture avec le soutien de la Direction régionale des Affaires culturelles de Provence Alpes Côte d’Azur, ce travail photographique s’attache à mettre en lumière le patrimoine fortifié des XIXe des territoires-frontières entre la France et l’Italie. Non pas les sites les plus connus, comme les constructions réalisées par Vauban qui aujourd’hui bénéficient d’une protection et de travaux de conservation, mais bien ceux, plus nombreux et moins accessibles, qui jalonnent les hauteurs des montagnes, parfois enterrés, camouflés dans le paysage ou au contraire impressionnants et majestueux comme des signaux de défense, des silhouettes de vigies.
© Michel Eisenlohr
Au fil des saisons, mon objectif a été de proposer une autre histoire de ces lieux, où la « grande » Histoire côtoie celle de l’infime. Où drame et mystère se rejoignent. Sur certains sites, des batailles ont été menées et les murs en gardent les stigmates. Dans d’autres, se fut l’attente des hommes, longue, épuisante durant des mois sans que rien ne bouge. Ce sont des histoires aujourd’hui silencieuses, intimement liées à un paysage d’une puissance écrasante.
Pour tendre vers cette émotion, il faut éprouver les lieux. Marcher, escalader parfois, accepter de se perdre. S’enfoncer dans les entrailles de béton en se laissant guider par un halo de lumière. Bivouaquer au pied des baraquements pour saisir l’ombre portée des ruines sous la pleine lune. Puis se lever aux premières lumières lorsque l’astre soleil apporte douceur à ces lieux abandonnés et torturés. Afin de capter ces lumières particulières, j’ai souvent travaillé en vitesses lentes, sur pied, et limité le nombre de prises de vues. J’ai besoin de ce rapport direct avec les éléments que je photographie, d’une confrontation physique au paysage. Je me sens alors comme un explorateur en milieu hostile, même si les paysages sont parcourus par de multiples chemins de randonnée. L’instant photographique devient un instant intime, une relation privilégiée entre le fort et moi. Le reportage «Gardiens des cimes » rejoint l’esprit des premières missions photographiques du XIXe siècle. Une vision artistique qui dépasse la fonction première de ces lieux pour en révéler la force plastique et le mystère.»
© Michel Eisenlohr
Michel Eisenlohr