© Dominique Mérigard
Revenir sur ces photographies, changer le format, mais aussi les combiner avec des vidéos pour en tirer un film, c’est ce que propose Dominique Mérigard pour cette nouvelle scénographie. Ses polaroïds redimensionnés cassent la distance habituelle pour nous faire entrer de plain-pied dans ces moments suspendus. On lit ici une même histoire dont la narration est revisitée pour en extraire une grâce de l’instant, un fragment de vie qui nous plonge dans l’intimité même de ces moments.
Dans cette série, c’est une chronique de l’enfance que Dominique Mérigard nous dévoile. Au fil des images apparaît la relation entre l’enfant et le monde qui l’entoure, mais aussi entre le photographe et son modèle, le père et sa fille. On s’évade de la réalité grâce au jeu qui se déroule là, en pleine lumière, celle propice au polaroïd. La part d’ombre, bien présente, n’est que la contrepartie naturelle de cette clarté. Elle nous rappelle que planent sur l’enfance tous les dangers du monde, mais que tous les miracles aussi sont possibles. Le photographe enregistre également l’envers du décor, le silence après les cris de joie, l’absence après l’espace rempli de la vie des enfants. Mais que disent à l’enfant ces photographies ? Elles lui rappellent la chaleur du soleil d’été, l’odeur de l’herbe fraîche, le cri du paon, le goût des vagues, l’éveil des sens. Image après image, l’écriture photographique se révèle et le polaroïd donne au monde une coloration particulière, empreinte de poésie.
La série s’est achevée en même temps que l’enfance se muait en adolescence et c’est ici la question de la transformation et du passage qui est posée, mais aussi celle du temps que l’on souhaite retenir, des souvenirs que l’on voudrait immortaliser. L’ enfance habite encore ces images, mais les expériences nouvelles, l’éveil au monde des adultes commencent aussi à s’incarner. Pour le photographe, c’est aussi la possibilité de retrouver la petite musique, douce ou amère, qui vient du plus profond de sa propre enfance. Des notes photographiques entre mémoire vivante et souvenirs enfouis.
Né en 1964, Dominique Mérigard vit et travaille à Paris. Il est diplômé de l’École supérieure des arts et industries graphiques Estienne. Photographe et graphiste, il a obtenu plusieurs bourses et résidences d’artiste. À travers ses photographies, il interroge les notions de temps, de mémoire, de transmission ou de perte, comme dans les séries Témoin S-21 (1994-1995) sur le génocide au Cambodge aux éditions Le Bec en l’air, Douro, journal des éléments (2000) aux éditions Filigranes, L’Expiré (1996-2007) réalisée au cimetière du Père-Lachaise à Paris aux éditions Filigranes, ou dans sa série en cours Beauséjour inventaire sur sa maison familiale. Ses photographies sont régulièrement présentées en France et à l’étranger. Le livre est une forme complémentaire et indissociable de son travail photographique. La série Prémisses (1997-2012) fait l’objet d’un livre paru aux éditions Filigranes en 2013