Robert Longo Untitled (Astronaut Tereshkova, First Woman in Space) (detail), 2015. Charcoal on mounted paper. Each 238,8 x 121,9 cm (94 x 48 in)
Expositions du 27/9/2015 au 23/12/15 Terminé
Galerie Thaddaeus Ropac 7 rue Debelleyme 75003 Paris France
La galerie Thaddaeus Ropac est heureuse d’annoncer l’exposition Space Age réunissant des œuvres, historiques ou commandées spécialement, de vingt artistes contemporains dans les quatre grandes salles du site de Pantin.Galerie Thaddaeus Ropac 7 rue Debelleyme 75003 Paris France
Depuis l’aube de l’humanité, le ciel et l’espace alimentent toutes sortes de fantasmes, mais aussi une quête scientifique inlassable et une curiosité artistique constante. L’exposition revient sur l’un des rêves collectifs les plus archaïques, incarné dans le mythe de Dédale et
Icare : prendre son envol et se fondre dans le cosmos.
Alors que l’on célébrait en 2013 le cinquantenaire du premier voyage d’une femme dans l’espace, Valentina Terechkova, et en 2014 les cinquante ans de coopération spatiale européenne, le film Gravity tout comme la mission Rosetta témoignent d’un intérêt renouvelé pour l’aventure spatiale. Nous avons invité des artistes de générations différentes et de sensibilités diverses à présenter des œuvres inspirées par l’espace dans ses nombreuses déclinaisons, depuis la science jusqu’à l’utopie.
Tout a commencé en 1957 avec le lancement du premier satellite artificiel, Spoutnik 1, qui a passionné le grand public et engendré l’une des dernières grandes utopies du XXe siècle. Toutes les innovations techniques, civiles et militaires, étaient mises au service de la mission spatiale soviétique, entraînant la société tout entière dans la compétition internationale.
Les fusées et les vaisseaux spatiaux symbolisent au plus haut point l’esprit de l’époque. Robert Rauschenberg, James Rosenquist, Richard Artschwager et Anselm Kiefer, qui ont vécu ces moments en direct, ont ressenti la nécessité de transcrire cette nouvelle iconographie dans leurs œuvres.
Anselm Kiefer rend hommage au poète futuriste russe Vélimir Khlebnikov, grand ami de l’artiste visionnaire Vladimir Tatline. En reliant le microcosme au macrocosme, il dévoile un univers poétique éminemment personnel. À Pantin, Kiefer présente une importante installation dont le titre, Une tombe dans les airs, est extrait du poème de Paul Celan Fugue de mort. Une fusée pointée vers le ciel, emblème du progrès, contraste avec une grande toile et des cadres brisés évoquant les vies humaines sacrifiées dans la poursuite de certains idéaux.
Robert Rauschenberg, précurseur du Pop Art, et James Rosenquist, l’un des protagonistes du mouvement, ont suivi de près les premières explorations spatiales américaines et leur cortège de découvertes scientifiques. Notre exposition comprend deux tableaux récents de Rosenquist dans lequels il transcrit une vision morcelée de l’espace dans un style immédiatement reconnaissable.
Rauschenberg, très proche de Rosenquist à bien des égards, défend tout de même une conception différente de la peinture. Pour lui, « un tableau ressemble plus à la réalité s’il est fait avec des fragments du réel ». C’est l’idée qu’il applique dès 1953 dans ses combine paintings. Après un séjour dans son Texas natal encombré de déchets industriels, il commence en 1986 la série des Gluts [Excédents], des sculptures créées en utilisant directement ces détritus. Grâce à la fondation Robert Rauschenberg, nous accueillons à Pantin, entre autres, le Nagshead Summer Glut Sketches. Cette sculpture murale de 1987, construite avec des morceaux d’avion, est un « souvenir sans nostalgie » réflétant les conséquences de la compétition industrielle et spatiale : le grand choc pétrolier des années 1970.
Après cette première crise pétrolière et alors que l’homme avait déjà marché sur la Lune, plusieurs accidents de navettes spatiales survenus dans les années 1980, puis la destruction de la station Mir décidée en 2001 font quelque peu retomber l’enthousiasme pour les espaces (imaginaires) infinis et les utopies visionnaires. Pourtant, un certain nombre d’artistes continuent à s’intéresser à l’espace et à la notion de progès technique au tournant du siècle et même après, peut-être de manière plus distanciée ou complexe. Notre exposition atteste que la prétendue « fin des utopies » n’a pas mis un terme au questionnement multiple des artistes sur notre rapport au ciel.
L’artiste sud-coréenne Lee Bul va créer une installation spécialement pour l’exposition. L’oeuvre sera dans la lignée de ses sculptures suspendues Aubade, inspirées de l’univers visionnaire de l’architecte Bruno Taut. À travers la politique des sexes, la notion d’imagination collective et le corps comme monument, Lee Bul interroge l’univers de la science fiction et du cybernétique. L’exploration de cette techno-utopie entre en résonance avec l’oeuvre ‘Monument’ for V. Tatlin de Dan Flavin, référence à la légendaire tour utopique de l’artiste russe Vladimir Tatline qui aurait rendu possible une expérience inédite de l’espace assez comparable à la sensation de voler.
Ilya & Emilia Kabakov, marqués par les répercussions du programme spatial soviétique, travaillent souvent autour du désir de s’élever dans les cieux, par le biais d’un rêve de cosmonaute absurde ou de différents modèles utopistes, comme ils l’ont encore démontré lors de l’édition 2014 de Monumenta au Grand Palais. Ils exposent à Pantin leur installation Ange déchu qui raconte le désir de voler dans les airs et son issue maheureuse, en référence au mythe d’Icare.
Space age
Tom Sachs, longtemps fasciné par les équipements de la NASA et animé d’un sentiment d’amour-haine envers le progrès, présente The Crawler, allusion directe à l’explosion de la navette Challenger en 1986. Avec ses maquettes aux allures de jouets, Tom Sachs nous fait comprendre que les techniques de pointe d’aujourd’hui annoncent parfois les catastrophes de demain.Robert Longo créera un diptyque dans lequel se reflèteront le cosmos et une femme astronaute l’un dans l’autre.
La série Premier vaisseau spatial sur Vénus de l’artiste suisse Sylvie Fleury s’apparente à un pendant féminin des maquettes de Tom Sachs. Jouant de l’attirance essentiellement masculine pour les vaisseaux spatiaux, elle a recréé ses fameuses fusées dressées à la verticale dans des couleurs insolites. Ces objets du désir phalliques ne s’envolent nulle part. Ancrés dans l’univers domestique, ils soulignent la valeur d’usage de l’iconographie spatiale, transformée en bien de consommation courante.
Entre les années 1950 et 1970, la littérature, le cinéma, la télévision, la mode et la musique se sont nourris de l’engouement pour l’aventure spatiale, où la science-fiction devenait réalité. 2001, l’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, Space Oddity de David Bowie et The Dark Side of the Moon des Pink Floyd constituent autant d’images et de mélodies indélébiles de l’ère spatiale.
L’artiste américain Cory Arcangel, imprégné de culture populaire et en particulier de jeux vidéo, s’en est inspiré pour son installation MIG29 Soviet Fighter Plane and Clouds. En bidouillant des cartouches Nintendo, il a créé une vidéo débarrassée de tous les aspects du jeu liés à la compétition. Il ne reste que les images synthétiques de ciel et les principaux protagonistes, ainsi que les célèbres nuages Nintendo et l’avion militaire russe.
Les manipulations numériques de Cory Arcangel nous amènent aux œuvres du cinéaste allemand Harun Farocki. Distingué par une mention spéciale décernée à titre posthume lors de la 56e Biennale de Venise en 2015, il est représenté dans notre exposition par ses vidéos Œil/machine I, II et III dans lesquelles il montre que les progrès de la recherche spatiale et de l’informatique ont servi pendant la guerre du Golfe à créer des réalités virtuelles visant à écraser les populations civiles.
Du désir de conquérir l’espace à la contemplation des cieux, l’exposition Space Age, offre une vision collective à laquelle Jules de Balincourt, Stephan Balkenhol, David Salle, Robert Longo, Alex Katz, Jack Pierson et Not Vital ont souhaité participer en réponse à notre invitation, accompagnés des œuvres de Philippe Bradshaw et de Sturtevant. Par leurs propositons, ils expriment leur ambivalence à l’égard des vecteurs du rêve utopiste, en même temps que leur volonté de repousser les frontières afin de conduire le spectateur sur des territoires encore inexplorés à ce jour.