© Sabine Mirlesse
Expositions du 1/9/2015 au 26/9/2015 Terminé
La Galerie Particulière 16 rue du Perche 75003 Paris France
D’études religieuses interrogeant le mysticisme jusqu’à la photographie, il n’y eut qu’un pas à franchir pour la jeune Sabine Mirlesse qui, convaincue que la photographie s’inscrivait dans le champ de l’art, vécut trois mois, après un master en photographie à New York à Parsons the New School for Design, en résidence d’art en Islande, terre mystérieuse, énigmatique et magique : là où la terre respire, bouge, tremble, où les secousses sismiques se multiplient, où les volcans éructent leur lave brûlante, où le sol bouillonne, se creuse et se gonfle – terre de vie et de mort.La Galerie Particulière 16 rue du Perche 75003 Paris France
Là où les contes et légendes nourrissent une culture, là enfin où le lien entre un peuple et son sol s’avère d’une extraordinaire intensité.
C’est le début d’une aventure, placée sous une double égide : le mythe de la «Pompéi du Nord», ce village qui a bravement survécu à l’éruption inattendue du volcan Heimaey dans les années 70 ; et, plus étonnant, un vers de Robert Frost issu du poème «Directive» - «comme si c’était une carrière» - enseigné dans les écoles américaines où l’artiste passa son enfance, sorte de refrain qui revint sans cesse à ses oreilles lors de son séjour en terre islandaise.
© Sabine Mirlesse
Dernier vers d’un long poème qui évoque la recherche de sa propre source, en creusant loin, profond, pour y trouver de l’eau, certes, mais aussi et surtout sa propre identité.
Loin du reportage et du documentaire, c’est à la recherche de cette «source» que s’est vouée l’artiste, interrogeant la puissance de leur lien à la terre pour qu’après la destruction de leur village, les habitants aient choisi de combattre les éléments et de rester – envers et contre tout.
C’est que l’identité islandaise se fond dans la terre, comme l’explique ce couple âgé qui refusa de partir, malgré l’indemnisation du gouvernement, comme en témoignent aussi , à leur façon, les visages enduits de boue et leurs empreintes sur la toile : sous une couche de terre mêlant le gris et le vert céladon, les visages s’unifient, retrouvent une dimension primitive d’avant la «civilisation», puis s’impriment sur une toile blanche, contours plus ou moins définis, formes plus ou moins ressemblantes, renvoyant doublement à la photographie comme empreinte et aux premières mains imprimées sur les grottes pariétales.
Quelque chose de l’origine, de l’originel et du primordial se dit ici.
© Sabine Mirlesse
L’œuvre de Sabine Mirlesse offre ainsi à notre regard ébloui la sauvagerie des laves incandescentes, le jaillissement des geysers, les brumes grises qui métamorphosent les paysages en contrées fantasmatiques, les gigantesques excavations qui creusent le sol – empreintes de créatures monstrueuses, surnaturelles ? - , mais aussi les tissus qui, partout, enserrent et protègent. Jusqu’à cette épaisse et chaude couverture de laine blanche dans laquelle s’enroulent, comme dans un cocon protecteur, une jeune fille et sa grand- mère, toutes deux prénommées Edda, un nom de saga viking...
Ni athée, ni croyante, Sabine Mirlesse accepte cependant les flux d’énergies , les mystères des éléments, comme elle souscrit à la quête d’identité. Nul hasard, dès lors, à ce que son prochain travail porte sur l’Arménie, ce légendaire Jardin d’Eden, un pays comme l’Islande, éclos au milieu de nulle part. Ni en Asie, ni en Europe.
Et là où, il y a des siècles, palpitait un autre volcan : Ararat.
Dominique Baqué