© Yves Marcellin / Galerie Arles
« Comme les pictorialistes d’il y a un siècle, Yves Marcellin fait de chacune de ses photographies l’équivalent d’un tableau. La manipulation des couleurs, les palimpsestes optiques nés de la surimpression, l’inscription de certains effets de vitesse ou de déplacement des signes dans ses photographies informent sans détour sur ses pulsions de peintre, sur sa volonté picturale. Le « devenir peinture » de la photographie n’est pas une fiction ou une aberration mais une évolution logique : on peut photographier comme l’on peint, définitivement », explique le critique d’art Paul Ardenne.
« Le régime adopté est, dans son cas, celui de la création pure et impure à la fois. Pure, parce que ce qui compte est de parvenir concrètement à l’image rêvée, dans une perspective antiréaliste voire idéaliste. Impure parce que, contre les tenants impénitents de la photographie comme « preuve » (le « ça a été » de Roland Barthes), on tourne ici le dos à l’impératif de témoigner, voire de signifier ». Il conclut : « Les portraits d’Yves Marcellin, pour solde de tout compte ? Un jeu libertaire avec l’image du corps, dans cette logique heureuse, serait-elle, le plus clair du temps, une inaccessible fiction : l’émerveillement ».
Portraitiste invétéré, Yves Marcellin se défie de l’exactitude photographique. Selon l’artiste photographe, le portrait est le résultat d’un travail et d’une combinaison. Le photographe, de manière invariable, modifie le rendu premier de l’image, il bricole, charge de traits, il déforme en multipliant les entrées sensibles. Le portrait mute en une métamorphose, il nourrit un univers fantasmatique. Un puissant esthétisme en émane, qui fait de l’image un attracteur.
La création artistique selon Yves Marcellin suppose une « cuisine », des manipulations, une recherche, des tâtonnements. Saisir le réel sur le vif n’intéresse que modérément ce photographe créatif. L’artiste explique : « J’utilise Photoshop en tant qu’espace de création numérique comme un peintre utilise sa palette pour le choix de ses couleurs et de sa matière ».