Vendredi 03 Août 2012 15:13:22 par actuphoto dans Expositions

Depuis 1999, Claude Iverné parcourt le Soudan et documente tous les aspects de l'histoire et de la vie de ce pays, tant par la photographie que par la vidéo ou les enregistrements sonores. Ces cinq dernières années, il a particulièrement porté son attention sur une très ancienne piste saharienne, toujours pratiquée par les caravanes, qui concentre la mémoire de tous les peuples qui s'y sont mélangés et les interrogations sur l'avenir incertain d'un mode de vie et d'une culture menacés pour des raisons tant économiques que climatiques. Cette « Piste des Quarante jours » qui relie le Sud-Soudan à la frontière égyptienne, soit mille huit cents kilomètres, a été parcourue durant des siècles par les conquérants, les pèlerins, les caravanes convoyant essentiellement des esclaves de l'Afrique noire vers le monde arabe méditerranéen. Aujourd'hui, les dromadaires ne transportent plus qu'eux-mêmes, destinés au trait ou à la boucherie en Egypte, ou à devenir bêtes de course dans quelque émirat du Golfe. Pourtant, cette épopée d'un mois et demi continue d'être une aventure, un rite d'initiation pour les plus jeunes chameliers, une nécessité économique pour un pays aux faibles ressources naturelles, si l'on excepte le pétrole dont les retombées financières ne concernent guère les populations. En même temps qu'il recense sur cette piste les traces d'une histoire séculaire, Claude Iverné nous fait partager le quotidien de l'expédition : son départ depuis un marché aux bestiaux à la frontière du Tchad, la traversée du désert libyen, la progression de plus en plus pénible pour les bêtes qu'il faut continuellement soigner en leur cousant des sacs de cuir sous leurs coussins gercés par la marche forcée, pour les hommes qui, hormis le guide en tête de convoi, suivent le troupeau à pied. Journal de bord méticuleusement annoté, ces images traduisent la vie au plus près, à hauteur d'homme ; leur auteur cherche à s'effacer, fuit les effets esthétiques autant que les clichés exotiques, sans pour autant occulter, ne serait-ce qu'en restituant l'immensité de l'espace, la dimension épique de cet exploit ordinaire. J.-C. F.