© Anne-Sophie Emard Istvan - 2015
Expositions du 19/6/2015 au 27/9/2015 Terminé
FRAC Auvergne 6 Rue du Terrail, 63000 Clermont-Ferrand France
Invité pour la troisième année consécutive à investir les espaces des cuisines du Domaine Royal de Randan, le Fonds Régional d’Art Contemporain a souhaité convier la photographe et vidéaste Anne-Sophie Emard à imaginer un parcours pour lequel certaines œuvres ont été spécifiquement créées.FRAC Auvergne 6 Rue du Terrail, 63000 Clermont-Ferrand France
Le titre de l’exposition – Seuls les amants restent en vie – est un hommage rendu au dernier film de Jim Jarmush, Only Lovers Left Alive. Cette histoire d’amour entre vampires est une assez belle métaphore de la manière dont peut être envisagée l’œuvre d’Anne-Sophie Emard, vampirisant avec amour des images de cinéma pour les propulser dans le réel de paysages photographiés en Auvergne, en Bretagne ou ailleurs.
L’art d’Anne-Sophie Emard s’est toujours situé aux croisées du cinéma, de la photographie et de la peinture, ce qui n’est pas très étonnant en définitive lorsqu’on sait de quelle manière ces genres se sont toujours alimentés mutuellement, croisant leurs héritages et échangeant leurs techniques. D’héritage et de technique, il en est beaucoup question dans les photographies, les boîtes lumineuse et les vidéos de cette artiste car ses œuvres puisent dans l’immense registre de l’image cinématographique, soit pour en utiliser le potentiel de narration, soit pour en extraire des détails qu’elle agence avec des prises de vues de paysages.à première vue, ses œuvres ne semblent pas dissimuler ce qu’elles sont. En effet, les images de cinéma se révèlent aisément dans leurs qualités chromatiques et leurs cadrages si caractéristiques, et il est assez facile pour l’amateur du 7ème art de reconnaître ici et là certaines grandes figures du cinéma américain, italien ou français. Kate Winslet, Monica Vitti,
Julie Delpy, Faye Dunaway, Julianne Moore, Tippi Hedren et d’autres actrices apparaissent ainsi, en images parcellaires composées au milieu de paysages. Néanmoins, en raison de l’irruption de ces images imaginaires, ces paysages se voient contaminés d’une puissance fictionnelle, source de projections et d’étrangeté. Ainsi, le Puy Mary de l’œuvre intitulée
Istvan perd son identité géographique ; l’étendue végétale de Kate, photographiée dans le Cantal, se transfigure en une lande desséchée que l’on pourrait imaginer située sur un autre continent. En langage cinématographique, on nomme « effet Koulechov » cette façon qu’ont les images de s’influencer mutuellement lorsqu’elles se trouvent mises en vis-à-à vis. Cet effet, qui agit sur notre perception inconsciente des images, est l’une des techniques favorites d’Anne-Sophie Emard et ses œuvres propulsent de simples paysages vers leurs extrapolations les plus étonnantes, insufflent aux images ainsi composées une magie qui souligne la belle anagramme des deux mots, magie/image.
Jean-Charles Vergne