©Bernard Plossu Sicile, Italie, 1999 Tirage argentique. 18 x 24 cm
Galerie Camera Obscura 268 Boulevard Raspail 75014 Paris France
L'exposition « Ciudades y Paisajes » a été créée en 2006 au MuVIM par Salvador Albiñana, professeur à l'université de Valence, avec l'aide de Juan Manuel Bonet, alors directeur de l'IVAM (il dirige actuellement l'Institut Cervantes de Paris). Elle fut aussi montrée à la base sous marine de Bordeaux en 2008.
Marcelo Fuentes st, 2008
Huile sur toile. 27 x 38 cm
« C'est une exposition qui me tient particulièrement à cœur que nous préparons pour la rentrée de septembre : j'avais depuis plusieurs années le projet de renouveler cette rencontre magique, initiée en 2006 par Salvador Albiñana pour le MuVIM (Museo Valenciano de la Ilustración y la Modernidad, Espagne), entre Bernard Plossu, photographe et Marcelo Fuentes, peintre, avec l'exposition "Ciudades y Paisajes". La joie que me procure ce projet est double : celle d'abord de montrer deux artistes dont l'œuvre ne cesse de m'enchanter (Plossu), ou a été une découverte marquante (Marcelo Fuentes), mais aussi de réfléchir "sur pièces" aux spécificités et à la rencontre féconde entre la photographie d'une part et le dessin et la peinture d'autre part » - Didier Brousse (Galerie Camera Obscura)
Villes et Paysages
« Après la mort de Jean-Baptiste Corot, en 1875, on a trouvé dans son atelier plus de trois cent photographies, pour la plupart des paysages. Le nom du paysagiste me venait à l'esprit alors que Marcelo Fuentes parlait de l'idée de préparer une exposition avec Bernard Plossu. Je connaissais déjà l'estime de Fuentes envers Corot, notamment pour ses oeuvres italiennes. J'ai su après qu'il s'agissait d'un amour partagé : "Ma dette : Corot et Malevitch", écrivait Plossu il y a quelques années. Et ce n'est pas leur seul trait commun. Ils sont proches aussi par leur condition d'artistes voyageurs des villes et autres paysages, par leur goût du petit format, et par leurs intérêts croisés entre la peinture et la photographie.
©Bernard Plossu
Taos, Nouveau Mexique, 1978 Tirage argentique. 24 x 30 cm
Marcelo Fuentes Queens, New York, 2010 Huile sur toile. 23 x 46,5 cm
Réunir les oeuvres de Plossu et de Fuentes nous permet de mettre en lumière certaines questions, comme celle de la distance entre acte et oeuvre dans l'un et l'autre médium, la perception inégale du temps dans la peinture et la photographie. John berger a écrit que, à partir du moment où l'image photographique est produite de manière instantanée grâce à la lumière, la figuration ne se trouve imprégnée ni d'expérience ni de conscience; le photographe, il est vrai, choisit le sujet, mais le rapport entre l'image et sa représentation est immédiate, elle n'est pas construite, contrairement à celle établie par le peintre, dont l'œuvre contient le temps que l'on passe à la faire. Dans ce sens, on rejoint l'observation d'Henri Cartier-Bresson : la photographie est une action immédiate; le dessin, une méditation.
©Bernard Plossu Hyères, 2002
Tirage argentique. 24 x 30 cm
La première serait l'impulsion spontanée d'une attention visuelle perpétuelle qui capte à la fois l'instant et son éternité, tandis que le dessin élaborerait ce que notre conscience perçoit de cet instant. La question, enfin, peut se compliquer avec les considérations sur l'une et l'autre technique faites par l'écrivain et psychanalyste Serge Tisseron à propos de l'intérêt de Plossu pour les appareils "jouets", pour les appareils jetables qu'il a toujours utilisés : "L'état d'esprit favorisé par l'appareil bon marché fait passer la disponibilité à l'émotion avant la fabrication de l'image. Ce n'est plus la maîtrise de la représentation du monde qui prime la relation avec lui, comme dans le dessin, la peinture et la procédure photographique traditionnelle, mais la continuité émotionnelle et sensorielle. Le geste photographique devient presque l'équivalent de l'acte perceptif lui-même. Bernard Plossu affectionne d'ailleurs de faire des photographies dans des situations de perception fugitive, en train, en autobus, en chemin de fer, en voiture, en train de marcher ou de sauter... Ainsi son regard n'est jamais celui d'un voyeur ou d'un chasseur d'images qui s'arrête et se concentre sur ce qu'il voit pour en 'prendre une image'. Tout au contraire, ces appareils lui permettent de faire du moment de la prise de vue le prolongement instantané d'une réceptivité. Il y gagne du même coup une connivence avec le réel que ni le dessinateur, ni le peintre ne pouvaient avoir." D'ailleurs, comme nous rappelle Tisseron, le photographe bouge, tandis que le peintre reste sur place; la photo est un acte avant d'être une image. Je ne sais pas si l'on pourrait affirmer quelque chose de semblable à propos de l'aquarelle - technique qui n'admet pas le délai -, qui doit être résolue en une seule fois et d'une manière urgente. Si c'était le cas, le résultat serait aussi un acte, même retardé, avant d'être une image, ce qui nous permettrait de parler de continuité émotionnelle et sensorielle et d'une certaine perception fugitive. » SALVADOR ALBIÑAN
« Marcelo Fuentes regarde les villes comme si elles étaient des natures mortes. Sa manière de dire, en peinture, les édifices, ne nous rappelle pas tant Edward Hopper (bien que, entre autres sujets, il ait souvent peint New York, et New York prend inéluctablement chez presque tous les peintres un certain air hopperien, avec ses briques rouges, ses escaliers d'incendies, ses réservoirs d'eau) que, surtout, Giorgio Morandi. » JUAN MANUEL BONET
Marcelo Fuentes
Brooklyn, New York (Dessin #2) Dessin. 17 x 24,5 cm
©Bernard Plossu
San Francisco, États-Unis, 1974 Tirage argentique. 18 x 24 cm
B. Plossu / M. Fuentes Villes et paysages
« Plossu réalise de nombreux clichés à bord de voitures et de trains alors que Fuentes intègre dans ses compositions et leurs matières picturales les effets de la vitesse et des trajets périphériques. Les points de vue ne relèvent pas d'une relation frontale, mais des à-côtés, pour l'un comme pour l'autre la distance qui nous sépare des objets des paysages est imposée par les structures urbaines et les réseaux routiers. Les barrières et balustrades, les grilles et les clôtures sont les garde-fous qui partent souvent en diagonale aux premiers plans. Tandis que le corps poursuit l'axe de sa trajectoire, comme dissocié le regard se perd, sorte de digression visuelle parfois brouillée par les vitres, arrêté par des murs, égaré dans la succession des couleurs qui se mélangent, les agencements des ombres et des lignes géométriques qui se poursuivent. » FARID ABDELOUAHAB
©Bernard Plossu. Vu du train, Alpes de Haute-Provence, 2003
©Bernard Plossu. Bruxelles, Belgique, 1998
*les textes cités sont des extraits du catalogue de l'exposition (édité par Isee Books)
Exposition présentée du 10 septembre au 18 Octobre
Vernissage en présence des artistes le mercredi 10 septembre à 18h
Horaires d’ouverture : 12h - 19h du mardi au vendredi / 11h - 19h le samedi