L'Atelier (Nantes) 1, rue de Chateaubriand 44000 Nantes France
« Cette année, en plus de son traditionnel rendez-vous du mois de septembre-octobre, la Quinzaine Photographique Nantaise investit l’Atelier à l’invitation de la Ville de Nantes.
Elle réunit pour l’occasion trois photographes suédois de renommée internationale, Christer Strömholm (1918 - 2002), Anders Petersen (1944) et JH Engström (1969).
Petersen fut de 1966 à 1968 l’élève de Strömholm ; 25 ans plus tard, en 1993, Engström devient l’assistant de Petersen. Trois générations inscrites dans une filiation artistique, une semblable relation à l’autre, au monde, et pourtant trois écritures singulières, tout à la fois autonomes et apparentées.
Dès lors, quel est cette sorte d’héritage ?
Ces liens de maître à élève ont-ils fait naître une spécificité suédoise, un genre de courant nordique comparable aux écoles d’Helsinki ou de Düsseldorf ?
Cette hypothèse séduisante doit cependant être déclinée, et c’est à vrai dire ce qui nous réjouit et a constitué le ferment de notre initiative.
Identifier des écoles est certes plaisant ! Derrière le foisonnement protéiforme de la création artistique, nous révélons des mécaniques, isolons des logiques. Un discours est alors possible qui favorise une perception d’ensemble de la création contemporaine. Mais parfois cette approche semble sans objet, on peine à trouver des régularités. Bien sûr, il se peut que l’on cherche ce qui n’existe pas, c’est embêtant et chronophage.
Il se peut aussi que ce que l’on cherche joue dans un registre moins apparent. Les plus puissants rayonnements ne sont-ils pas invisibles ? Découvrir des corrélations formelles nous conforte dans ce goût de la taxinomie, par contre lorsque les liens sont plus sensibles, les parentés deviennent plus discrètes .
Voici donc 3 Suédois que nous souhaitions faire aller ensemble, non parce que tous trois sont de Suède et photographes, mais parce qu’ils ont croisé leurs histoires, choisis d’être proches.
Ces affinités qui nous construisent sont des courants de fond, puissants et invisibles, un goût des autres qui fait tourner le monde ! »
Hervé Marchand
Vous retrouverez dans l’exposition des photographies issues des séries :
- Christer Strömholm «Espagne, Japon, Inde, États-Unis, 1962», «Place Blanche, 1956-1962», «Abstractions, 1949- 1953», «Paris», «Pigalle»
- Anders Petersen «Soho, 2011», «From Back Home, 2009», «St Étienne», «Close Distance», «Mental Hospital», «Café Lehmitz, 1967-1970»
- JH Engström «Sketch of Paris» et «Haunts» JH Engström projection en continu du film «À propos d’Anders Petersen, a film about with»
Christer Strömholm :
«Trop longtemps méconnu, Christer Strömholm se révèle être un des photographes essentiels de la seconde moitié du XX° siècle. Farouchement indépendant, il a développé une œuvre sombre, marquée par la présence constante de la mort, par l’inéluctable de la finitude.»
Christian Caujolle, Agence VU’ Galerie, éd. Actes Sud, Photo Poche n°107, 2006
Place Blanche, 1956-1962
La série Place Blanche, réalisée entre 1956 et 1962, est consacrée aux travestis et transsexuels de ce quartier parisien. Strömholm ne met pas à nu ses modèles. Jamais voyeur, il sait préserver mystère et ambiguïté.
Snake in Mouth, Paris, 1955 © Christer Strömholm / galerie VU’
Barcelone, 1959 © Christer Strömholm / galerie VU’
Anders Petersen :
« L’ancien élève et ami de Christer Stromhölm reste comme toujours attaché à l’humain, à son énigme, à sa solitude et à la profondeur des sentiments complexes qu’il a su mettre en évidence aussi bien à l’hôpital psychiatrique qu’en prison. Pour aboutir à cette profonde « vérité », il vit avec ceux qu’il photographie. Il résume parfaitement le dilemme qui est le sien : « Je sais que pour faire de bonnes photographies, pour être à la distance juste, il faut que j’aie un pied dedans et un pied dehors. Mon problème, c’est que je finis toujours par avoir les deux pieds dedans !
Cela date du tout début, quand, en 1967, il s’installe pour trois ans dans un bistrot du port de Hambourg, le café Lehmnitz, hanté par les marins en goguette, les prostituées, les paumés et les alcooliques du quartier. Là, on boit, on danse, on s’aime, on pleure, on chante. Anders vit là, prend des photos au vol et dresse un portrait bouleversant d’une humanité en dérive qu’il aime profondément. Et il révèle, dans des situations de marginalisation, une intensité et une vérité rares des sentiments.
Poète d’un monde souvent noir, raisonnable à sa manière parce qu’excessif, Anders Petersen est en constante prise de risque.»
Christian Caujolle, Agence VU’ Galerie, Photo Poche n°107, Actes Sud, 2006
Algsjovallen, 1998, de la série From Back Home © Anders Petersen / Galerie VU’
JH Engström :
JH Engström fabrique des histoires. Monté en séquence, présenté dans des livres et exposé en réseaux et constellations, il pousse le spectateur à comprendre le travail comme un tout, plutôt qu’à prendre une image à la fois. Généralement, les rapprochements choisis par l’artiste juxtaposent divers sujets et points de vue : le gros plan et le très loin, le fragment et la vue d’ensemble, le tendre ou le poétique et le choquant. [...] Et pourtant, malgré cet éclecticisme, comme le lecteur d’un roman dans lequel l’auteur brise l’ordre temporel en fragments en intervertissant des temps et des lieux, nous sommes d’une façon ou d’une autre capables de construire un récit, bien que celui-ci soit décousu, peu concluant et ouvert aux envolées de l’imagination.
Grant Watson, in Photo Art. The New World of Photography, Thames & Hudson, 2008
Sketch of Paris
En 1979, à l’âge de dix ans, JH Engström quitte sa Suède natale avec sa famille pour un séjour de deux ans à Paris. Depuis, la capitale française est devenue sa deuxième maison. Ces photos prises entre 1991 et 2012 composent une sorte de journal intime non chronologique de sa relation à cette ville à l’âge adulte et montrent une image très éloignée des clichés habituels de la capitale.
A propos d’Anders Petersen, a film about with
Côtoyant Petersen dans sa vie privée et dans sa vie d’artiste, JH Engström, qui fut son élève puis son assistant, avant de devenir lui- même un photographe interroge ici, les turbulences émotionnelles d’une vie au jour-le-jour, les doutes de l’homme comme ceux du photographe... Sa position de cinéaste s’affirme dans le questionnement des méthodes de son mentor, de ses actions et de son comportement en pleine création. Offrant une sélection de photographies, le film invite à découvrir la manière dont s’exerce l’art photographique de Petersen aussi loin qu’il aille dans son développement artistique, jusque dans les situations les plus intimes ou physiquement dégradantes.
2006 - VO suédoise sous-titrée en français, 52 min.
De la série Sktech from Paris © JH Engström / Galerie VU’