© Milomir Kova?evi?
Maison d'Europe et d'Orient 3 passage Hennel 75012 PARIS France
L'instant pour la mémoire, Sarajevo 92-95
Millomir Kovačevic Strašni n'est pas un photographe de guerre. À la différence de la plupart de ses confrères, Strašni ne s’était pas rendu à Sarajevo pour témoigner de l’horreur de la vie quotidienne pendant le siège. Il y était déjà.
Chroniqueur visuel de la capitale de Bosnie-Herzégovine depuis l’âge de 17 ans, il en connaissait tous les recoins, passages obscurs, ruelles pavées de la vielle ville et longues avenues des quartiers modernes. Du monde, il en connaissait beaucoup׃ vieux promeneurs, jeunes filles splendides dans la fraîcheur de leur âge tendre, gamins de rue, paysans de marché, petits caïds, revendeurs du coin de la rue, professeurs et ouvriers se pressaient déjà devant l’objectif de Milomir du temps de la paix.
Milomir, n'avait donc qu'à rester près de ses concitoyens pendant des années de guerre, pour témoigner d’une manière on ne peut plus juste, de ce qu’était le siège de Sarajevo.
Et c’est cette justesse du regard qui rend les photos de Strašni uniques. Nul besoin d’être de Sarajevo et d’y avoir vécu pendant la guerre pour percevoir l’authenticité qui se dégage de ses photographies.
On le voit dans les yeux des « modèles » de Milomir. Ceux-ci expriment une forme de délivrance émotionnelle suscitée par la rencontre avec ce photographe doté d’un degré d’empathie rare inhérent à son talent. Soucieux de rendre compte de la condition humaine, Strašni œuvre dans le respect de ses modèles, quelque soit leur origine, position sociale ou leur parcours.
Les portraits réalisés à Sarajevo entre 1992 et 1995 montrent cette magnifique symbiose qui s’opère entre le photographe et ses modèles. La situation de guerre que l’on ne distingue qu’à peine derrière les visages est pourtant bien réelle.
La rencontre avec Milomir est l’un de ces moments rares ou, malgré la souffrance du quotidien, la peur, la faim, le froid, la confiance aux autres renaît et la vie s’enrichit d’un bel instant de plus. Un instant pour la mémoire. Une mémoire pour nous tous.
Asja PROHIĆ
© Milomir Kovačević
© Milomir Kovačević