Nan Goldin est une photographe américaine, née en 1953 dans le Maryland au sein d'une famille bourgeoise. À quinze ans elle s’initie à la photographie, poussée par un de ses professeurs à Boston où elle intègre l’Ecole des Beaux Arts. Elle rencontre ainsi le photographe David Armstrong, drag queen : elle côtoie alors un milieu marginalisé et le photographie tout au long de sa vie.
« Ce qui m’intéressait le plus c’est de photographier le comportement physiques des gens, leur sexualité, leur identité sexuelle. Dès le début de mon travaille sur les travestis, je les percevais déjà comme un troisième sexe ».
Brutes et sans fard, ses images confrontent le spectateur à l’intime, au dérangeant, sans pour autant tomber dans le voyeurisme. Comme par effraction dans un monde en marge, son regard décèle la vie telle qu'elle est, sans censures. Intéressée par le comportement physique des gens, l’artiste travaille principalement sur les thèmes de la drogue, la violence, le sexe et l’angoisse. Elle rend compte de la richesse humaine à chaque instant, à portée du regard. En sublimant l’intime, elle photographie la douleur et la difficulté de survivre. En effet, ses clichés soulignent un passé difficile : une vie marquée par le suicide de sa sœur. « J’ai commencé à prendre des photos à cause du suicide de ma soeur. Je l’ai perdue et je suis devenue obsédée par l’idée de ne plus jamais perdre le souvenir de personne. »
Ses photographies sont à l’image de sa propre vie : spontanée et impulsive. Ce sont des images prises sur le vif. Elle ira même jusqu’à se photographier peu après avoir été battue par son petit ami de l’époque. Des blessures qui auraient pu lui faire perdre la vue.
Comment parler de soi et des autres au travers des corps et de la lumière ? « The Ballad of Sexual Dependency » accumule les diapositives prises sur l'existence de la jeune artiste, sur sa vie de famille, ses amis et modèles atteints du sida, qu’elle suit jusqu’à leur mort. La série de diaporamas est constituée de plus de 800 diapositives projetées en boucle, accompagnées de musiques d’inspirations diverses telles que James Brown, Maria Callas ou encore le Velvet Underground.
La musique aura touché Nan Goldin. Elle se familiarise avec la culture Punk et la tendance « no future » des groupes comme les Sex Pistols et Clash pendant son séjour à Londres en 1978. Nan Goldin a vécu à New York dans un quartier populaire, travaillant en tant que barmaid. Elle commence alors à exposer ses photographies. Les projections des premières versions du diaporama de la « Ballade » au Rafiks Underground Cinéma, au Mudd Club ou au Maggie Smith's Tin Pan Alley de Times Square intéressent les organisateurs de festivals et les musées en quête de talents et de vision neuves.
La photographe passe du noir et blanc à des couleurs saturées plongées dans une lumière artificielle. Elle joue sur l’éclairage, et attribue à ces clichés une grande sensualité, mêlant le fond et la forme. « Pendant des années mon travail a traité de la dépendance sexuelle (…) je suis obsédée par le fait qu’on puisse être attiré par quelqu’un qui ne vous convient pas tant sur le plan affectif que sur le plan intellectuel ». Derrière un sombre décor, elle réussit à rendre hommage à la beauté et à la nature humaine.
L’artiste vit à présent entre Londres et Paris. Lauréate du Prix Hasselblad en 2007, ses œuvres de Nan Goldin sont affichées à Arles en 1987, 1997 et 2009. Elle présente « Nan Goldin, le feu follet » au Centre Pompidou en 2001 et raconte l'histoire de sa vie noctambule au coeur de la contre-culture américaine.
Dernièrement, en septembre 2013, Sabine Lidl retrace le parcours de Nan Goldin dans son documentaire « I remember your face » lors du 9ème festival de Zurich. Pour ce portrait, la réalisatrice revient sur le passé sulfureux de Nan Goldin, une artiste atypique qui n’est pas prête de s’assagir. Dans son nouveau livre « Eden and After » sorti en mars 2014, elle photographie les enfants de ses amis qu'elle suit de leur naissance à l'adolescence.