© Ai Weiwei
Un bouquet de fleurs dans le panier de son vélo. Voilà le geste de résistance quotidienne de l'artiste dissident chinois Ai Weiwei, interdit de franchir les portes de Pékin. Suite à une dénonciation pour évasion fiscale, la police chinoise lui a confisqué son passeport, en le privant du droit de voyager.
Photographe, architecte, musicien, bloguer, Ai Weiwei est un artiste polyvalent et éclectique qui a commencé tôt à subir la persécution de l'Etat chinois. Son père, le poète Ai Qing, avait été envoyé dans un camp de travail avec toute la famille. L' enfance d'Ai Weiwei s'écoule dans ce long confinement. Après son retour à Pékin où il fréquente l'université du cinéma, il laisse son pays au début des années 1980 pour s'installer aux Etats-Unis et documenter la vie et la société new-yorkaise. En 1993, il revient à Pékin où il y poursuit son activité artistique de dénonciation. Mais l'hostilité du gouvernement n'a pas cessé au fil du temps. A travers son art provocateur et ses positions radicales, Ai Weiwei doit faire face à la répression et la diffamation de la part de l'Etat.
En 2008, les autorités ferment son blog et en 2011 il est emprisonné pendant 81 jours dans des conditions inhumaines. La confiscation du passeport n'est, donc, que la dernière des nombreuses mesures violentes prises contre l'artiste. Toutefois, sa réponse n'a pas dû se faire attendre. Chaque jours, depuis le 30 novembre dernier, il orne le panier de son vélo d'un bouquet de fleurs, garé au 258 Caochangdi. Chaque jour, il l'immortalise pour le poster sur Twitter, en témoignage de sa surveillance. Si l'artiste ne peut plus bouger, son art contestataire voyage à travers les réseaux sociaux, en faisant le tour du monde.
Un bouquet bariolé et un vélo: deux objets simples, pourtant si significatifs, dont l'artiste en fait un moyen d'expression contre la censure afin de dénoncer la politique contraignante et centralisée de son pays. Tout son art s'inscrit dans cette tentative de démystification du sacré politique pour dévoiler l'absence d'un état de droit.
Malgré sa persécution en Chine - où il a toutefois contribué à la conception du Stade Olympique- l'artiste mène une activité artistique très vive à l'étranger. En France il a été connu notamment à travers « Ai Weiwei : Entrelacs », l'exposition présentée en 2012 au musée du Jeu de Paume à Paris. Il est récemment devenu ambassadeur de Reporters sans Frontières pour qui il a conçu un album de 100 photographies pour la liberté de presse en septembre 2013.
Sa protestation se poursuivra jusqu'à ce que son droit à voyager lui soit rendu.
Anna Biazzi