“Spoutnik” Iva?n et Kloka effectuant leur sortie historique hors de la capsule, 1968 © Joan Fontcuberta
Maison Européenne de la Photographie 5, 7 Rue de Fourcy 75004 Paris France
Artiste contemporain catalan, Joan Fontcuberta a connu pendant sa jeunesse la dictature franquiste, et avec elle la censure et la falsification de l’information. Diplômé en sciences de l’information, théoricien, critique, historien et professeur, il questionne dans son travail toutes les formes de prétendue vérité. Son œuvre, s’appuyant sur les possibilités offertes par l’image photographique et ses capacités de manipulation, nous entraine dans une réalité à la fois vraisemblable et insolite.
L’exposition à la maison Européenne de la Photographie présente, autour de dix séries, un parcours tout au long de l’œuvre de Joan Fontcuberta, articulé autour de l’idée de camouflage : camouflage de l’auteur, camouflage de la photographie, camouflage de la réalité, camouflage de la vérité...
“Herbarium” Guillumeta polymorpha, 1982 © Joan Fontcuberta
Neuf séries, conceptuellement autonomes, sont présentées selon une structure modulaire, l’exposition devenant ainsi une “exposition d’expositions”. Un dixième projet, “camouflages” - une série de portraits, inspirés des chefs-d’œuvre de la peinture, intégrant des éléments de la physionomie de Joan Fontcuberta - qui donne son titre à l’exposition, est “camouflée” dans les différents espaces de la maison Européenne de la Photographie.
"Miracles & Co"
Munkki Juhani fait lire un chapitre du Kalevala à des suricates lapons, 2002 © Joan Foncuberta
L’exposition développe ainsi une stratégie rhétorique, abordant de manière critique les discours d’autorité que sont les discours de la science, de la religion, de l’art, du journalisme et de la politique, qui fonctionnent comme lieux de construction du savoir et de la légitimation des valeurs. Avec Joan Fontcuberta, la nature documentaire de la photographie comme outil de connaissance et de crédibilité est mise en dérive. Toujours avec humour, car comme l’écrit Clément Chéroux, « s’il est une vertu dont l’œuvre de Joan Fontcuberta n’est pas dénuée, c’est bien l’espièglerie. Depuis maintenant près de quatre décennies, c’est avec une bienveillante malice que cet artiste catalan utilise l’aura d’authenticité de l’image photographique pour inventer des histoires, répandre des rumeurs, engendrer des chimères, créer des mythes, et nous faire ainsi prendre des vessies pour des lanternes. »
“Sirènes”
Squelette d’Hydropithèque, Baie de Portissol, Sanary sur mer, 2012 © Joan Fontcuberta
« Joan Fontcuberta est un artiste dont la réflexion théorique accompagne toute la carrière, mais il bénéficie aussi du regard de nombreux analystes qui, depuis plus de trente ans, éclairent son œuvre sous les angles les plus divers. Dans ce feu croisé des discours, Fontcuberta connaît une forte critique qui ne laisse rien de son œuvre dans l’ombre. cette clarté contraste toutefois avec ce qui forme l’essence de ses travaux : un art consommé de la confusion des genres et des messages, un goût immodéré pour le trouble quant au degré de réalité des phénomènes. l’artiste serait ainsi quelque peu docteur Jekyll et mister hyde : pédagogue de notre monde moderne en même temps que virtuose dans l’art de tendre des pièges à la raison. Tout serait ainsi en ordre dans la vie d’un artiste dialecticien qui a mis la photographie et, plus largement, l’image, au cœur de son propos. Il s’avère toutefois utile de rebattre encore les cartes d’une œuvre qui s’ingénie à faire bégayer le sens pour considérer Fontcuberta avec quelque distance. Dans quelle histoire s’inscrit-il aujourd’hui ? (...) l’artiste est en dialogue avec des idées profondes de l’époque moderne : la puissance des discours qui déterminent notre regard sur le monde, la place de l’artiste dans la société, la fonction de l’humour face à l’autorité. Autant de thèmes qui parcourent une œuvre résistant à toute classification. »
Michel Poivert, extrait du catalogue de l’exposition
Rencontre avec Joan Fontcuberta le mercredi 12 février 2014, de 18h à 20h à l’auditorium de la MEP, en accès libre sur présentation du billet d’entrée, dans la limite de splaces disponibles.