Point Rouge Gallery 4 rue du Dahomey 75011 Paris France
L’écriture et l’image se mêlent sans cesse, s’empilent, s’emboitent.
Tantôt la première est à l’origine de la seconde, tantôt c’est cette dernière qui prendra le dessus. Comment parvenir à l’équilibre ?
Le découvert de l’âme se laisse parfois aller à quelque excès dans l’usage des mots.
La brutalité crue du verbe fane les fleurs de camélias et laisse la rouille s’imposer trop vite.
C’est la photographie, dans sa généreuse pérennité, qui offrira l’immortalité à celles qui ont eu la force et l’énergie nécessaires pour s’épanouir les pieds dans la neige.
Les images s’interprèteront à l’infini, avec plus de douceur, laissant l’espace à la réminiscence.
Il est des rencontres essentielles, de celles qui vous intiment de réfléchir à votre statut d’humain et dont l’encombrante et cognitive beauté vous entraine à ne plus faire comme avant.
Mais plutôt qu’un portrait, qui dit si peu qu’il en devient infidèle, qui dit tellement qu’il en devient indécent, j’ai préféré, ici à toute bonne fin, les paysages.
Eux seuls raconteront les moments vécus ou rêvés, diront le soutien de cette nature tant aimée, de ces vagues dans lesquelles on nage à proximité d’un horizon à la plénitude réconfortante, de ces chemins que l’on emprunte indéfiniment dans une délicieuse et rassurante récurrence.
Ces images symbolisent la permanente quête du photographe qui tente de poursuivre sa route, sans trop songer que les êtres chéris sont de plus en plus nombreux à se parer de transparence.
Ainsi que moi, mes images, ne sont faites que de rencontres.
Elles prennent corps dans le souvenir de belles phrases murmurées dans un sourire songeur : « L’homme doit jouer sa note dans le concert universel, peut-être est-ce là la raison de sa présence en ce monde… Jouer une note… »
Elles ont pour viatique les exigeantes et douces attentions que quelqu’une vous adressa les yeux dans les yeux : « Lorsque vous discutez avec quelqu’un ne vous tenez pas en dessous, pas au-dessus non plus. Face à face, Marie. Face à face…»
Petit à petit, sans doute s’habitue-t-on à l’absence. Parvient-on même à faire usage de la mémoire sans excès de mélancolie, en songeant, à l’instant où elle pourrait l’emporter, qu’il existe la possibilité de ce léger déplacement, de ce « Sel de la vie » dont parle si justement Françoise Héritier.
L’acte photographique ne montrera pas tout, alors on le réitérera sans fin jusqu’à pressentir, telle une transposition du souvenir d’une caresse sur la main, la lumière qui dessine la représentation tant espérée.
Marie Rameau, 4 juin 2013