© Akira Inumaru
Le 3 maison saint-honoré 3 rue duphot 75001 Paris France
Hervé All
Cécile Decorniquet
(Lauréat prix SFR Jeunes talents 2013)
Marc Donikian
Akira Inumaru
Olivier Valsecchi
(Lauréat Hasselblad Masters Award, catégorie Fine Art 2012)
Les photographies de Super/natural sont autant de visions hallucinées, connectées, fantasmées de la nature et du corps a travers la photographie, visions qui traversent la pellicule du sensible et ouvrent quelques portes magiques.
Les cinq artistes retenus réactivent des images et des croyances anciennes, s'inscrivent dans la continuité de certaines mémoires et proposent des échanges sur un mode transculturel :
Les voyages initiatiques d'Hervé All puisent leur source au Mexique et dans la culture Maya
Les mises en scène de Cécile Decorniquet résonnent avec les contes et rêveries européennes
Les arbres communiquant de Marc Donikian révèlent des champs d'ondes animistes
Les ponts entre monde visible et invisible d'Akira Inumaru sont empreints de culture japonaise
L'usage de la cendre chez Olivier Valsecchi convoque l'imprégnation indienne de Samsara
Les oeuvres sélectionnées résultent d'approches performatives (manipulation du temps, de la lumière, de l'espace), ou l'engagement physique et mental (de l'artiste, du modèle) est un vecteur clef pour ouvrir sur une certaine porosité du réel. Cette exposition se vit comme une traversée.
© Olivier Valsecchi
Hervé All
Séries Women Lightscape et Dancing Leaves
Admirateur des distorsions d'André Kertesz et des juxtapositions de Man Ray, Hervé All est l'arrière petit-fils des surréalistes.
Il naît à Lyon en 1976, avenue des Frères Lumière, l'un des berceaux de la photographie. Si l'on se plait à déceler le hasard objectif cher à ses pères dans ce singulier lieu de naissance, sa vocation semble doublement prédestinée car non seulement il choisit la photographie mais il lui apporte un surcroît de lumière, travaillant ses sujets avec une lampe de poche.
En se chargeant de lumière, le corps (Women Lightscape) ou la plante (Dancing Leaves) vibre, et s’étire dans une temporalité revisitée car un long temps de pose est nécessaire pour saisir l’évènement. Dans les fragmentations et les transparences, le sujet quitte l’instant fugace pour laisser des traces pérennes en rayonnant sur son environnement. Il ne s’agit pas de saisir un moment photographique mais d’explorer un intervalle ou notre existence – ou plutôt notre conscience d’être au monde – est à repenser.
Cécile Decorniquet
Séries Allégories et Fables
Diplomée de l’École des Gobelins, nominée au prix HSBC 2012, lauréate Jeunes Talents SFR 2013, c’est une jeune photographe qui nous ouvre les portes de son univers teinté d’imaginaire, d’onirisme et d’illusion.
Explorant le réel, Cécile Decorniquet aime l’idée de « transfigurer cette réalité à travers l’imaginaire du photographe afin de s’inscrire dans une démarche de création ». Son travail est un voyage tourné essentiellement vers le portrait qu’elle décline dans des séries où l’enfance est racontée tel un conte, où la féminité est évoquée dans une dimension d’étrangeté.
Cécile Decorniquet manipule l’image en imposant des perspectives singulières et inhabituelles du portrait contemporain, appelant aussi bien les maitres de la peinture flamande que ceux de la peinture baroque espagnole, ou encore la rêverie mélancolique des petites filles de Lewis Carroll.
Marc Donikian
Séries Arbres communiquants
Pour reprendre l’allégation de Barthes et son questionnement relatif à l’image révélatrice du sujet, le photographe ne doit-il pas rendre « à l’âme transparente son ombre claire » ? Chaque cliché capture indéniablement une partie de notre histoire, si ce n’est de notre âme. Marc Donikian évoque la fuite du temps en une poétique du visible et de l’invisible.
Ce qui frappe est avant tout la perte de repère que produit l’absence de cadrage. Les lignes s’entremêlent pour créer un sensation de vitesse ou d’inertie, fractures abstraites altérées par d’imperceptibles traces : de caractéristiques « griffures » verticales ou diagonales, seules variations de la lumière rendues par une pose lente et étudiée, l'ombre d’une main passée devant l’objectif au moment de prendre le cliché et qui confine la vue dans une « tête d’épingle de lumière ».
De même que cette technique très particulière, utilisée en référence au sténopé, le support du papier baryté rappelle les travaux des premiers photographes. Pourtant, à l’inverse de ce que l’on pourrait attendre, c’est ici l’ombre qui révèle l’image ; c’est elle encore qui permet d’accéder à l’intemporalité des valeurs sourdes. Les clichés de Marc Donikian sont le fruit d’un voyage solitaire et contemplatif. Miroirs d'un temps révolu, ils déploient un flot vibratoire tapissant la chair même de l’image. La part de l’ombre, Damien Chantrenne
© Cécile Decorniquet
Akira Inumaru
Série Ignis Fatuus
Après avoir achevé ses études d’art au Japon, Akira Inumaru (né en 1984) s’installe en France où il s’engage dans un travail performatif d’où naissent des photographies et des dessins.
Dans sa première série Hanamuke, l’artiste embrasse un crâne humain sous une pluie de
fleurs dans un échange fécond entre forces de la vie et forces de la mort. Il confie que « la force vitale, c’est comme l’électricité, et la vie, c’est une explosion. La force de la mort est comme un trou noir qui apparaît après la grande explosion première. C’est un espace d’énergie extrêmement dense qui avale tous les esprits, toutes les lumières et toutes les mémoires ».
La série de photographies Ignis Fatuus exposée ici fait référence au « feu insensé », celui d’une flamme pâle ou phosphorescence parfois vus sur un terrain marécageux dans la nuit. Elle est considérée comme étant due à la combustion spontanée de méthane ou d'autres hydrocarbures provenant de la décomposition des matières organiques. Akira Inumaru joue de ce phénomène naturel, qui semble surnaturel, avec des fleurs fraîches dont la combustion convoque le spectre coloré d’un arc-en ciel.
Olivier Valsecchi
Séries Dust et Time of war
Pour sa série Dust, Olivier Valsecchi a photographié des modèles recouverts de cendres qui se sont livrés à des chorégraphies jusqu’à épuisement, jusqu’à atteindre une « dislocation du corps et de l’esprit ». Les images qui en résultent évoquent le Chaos, le cycle naissance-mort-renaissance dans un jeu de clair-obscur.
Le point de départ de Dust est l’usage de la cendre, une matière aux connotations spirituelles fortes. On retrouve l’utilisation de la cendre pour sa charge sacrée dans de nombreuses civilisations, en Inde notamment ou les cadavres passent par la purification par le feu. Les cendres sont la matière pure demeurant, débarassée des mauvais esprits, symbole d’impermanence et de traversée. Il s’intéresse également à la théorie du Chaos comme origine du Monde. Cette théorie du Chaos primordial explique la naissance du monde par le résultat d’un conflit entre des forces antagonistes : lumière et ténèbres, ordre et désordre. Chaque image est un huis clos dans lequel se confondent chute et envol, ordre et désordre, lumière et ténèbres, brouillard et liquide, tourment et frénésie. Dust peut apparaître comme le versant photographique du Chaos primordial que la cosmogonie grecque décrivait comme la combinaison fortuite des 5 éléments.
Inspiré du Chaos selon Ovide, du Mercredi des Cendres et du Mantra de la Lumière, Time of War est le second volet de la saga I am Dust, projet autobiographique sur ce thème de l’incarnation et du cycle des renaissances. Le titre Time of War est emprunté à l'exposition Goya in Times of War organisée par le Musée du Prado en 2008 en commémoration de la Guerre d'Indépendance espagnole débutée en 1808.
Time of War (2012) fait suite à Dust (2009) qui a valu à Olivier le prestigieux Hasselblad Masters Award - catégorie Fine Art.
© Hervé All