Vignette © Michel Le Belhomme
exp12/exposure twelve Greifswalder Straße 217 10405 Berlin Allemagne
« There are more things » est le titre d’une nouvelle de Jorge Luis Borges et le titre de l’exposition regroupant deux artistes, David Favrod et Michel Le Belhomme.
David Favrod, fils de parents japonais et suisse, pose à travers ses photos la question de l’identité, des racines et de son appartenance à deux cultures étrangères.
Michel Le Belhomme crée ce qu’il appelle des « environnements » à taille humaine ou à plus petite échelle, dans sa maison, à l’intérieur ou à l’extérieur, pour traiter l’enfermement de l’espace quotidien et l’aliénation qui peut en résulter.
© David Favrod, «Le départ»
Dans la nouvelle de J.L. Borges, une maison rouge, vendue à la suite d’un décès familial fascine et effraie. L’intrusion à l’intérieur par le narrateur est décrite comme un rêve monstrueux, où l’homme bascule entre le fantastique et l’irréel. Dans ses nouvelles, J.L. Borges mêle récits de souvenirs, détails anodins et apparitions, il s’écarte du fil narratif par associations, et laisse une fin pouvant paraître inachevée, qui déroute. Le sens ne se perçoit pas de manière évidente la première fois, des relectures peuvent donner d’autres directions ou bouleverser les certitudes acquises auparavant.
© Michel Le Belhomme
Tel J.L. Borges, les travaux de Michel LB et David F expérimentent les échelles et les représentations en se réappropriant l’ordinaire et le quotidien, dans un jeu poétique parfois absurde ou ironique. Ils détournent des éléments caractéristiques de la vie quotidienne ou de la nature. Les plantes abondent dans les images de Michel LB et menacent; David F utilise la végétation en référence à l’imagerie japonaise et la symbolique qu’elle transporte. Michel LB brule une reproduction d’une chambre d’enfants, David F montre un étrange incendie urbain via google earth.
© David Favrod
Une lumière se laisse deviner dans une pièce enfumée, une forme lumineuse est construite sur un lit. Leurs images mêlent des signes, personnels et communs, et appellent ainsi à la découverte d’un autre sens, lié à leur histoire, ou à celle de celui qui regarde. Dans la nouvelle de Borges, le narrateur demande « Si nous avions une vision réelle de l’univers, peut être pourrions nous le comprendre ». David F « How much does it concretely relates to reality or not ?”.
Michel LB cite une phrase de Alain Robbe - Grillet “ « (….) nous avons éprouvé, une fois de trop, le choc de cette réalité têtue dont nous faisons semblant d’être venus à bout. (…) ». Quelle est la part du rêve ou du fictif ? La photographie devient alors un seuil entre plusieurs réalités possibles. L’accrochage croisé en mosaique de l’exposition vient appuyer ce dialogue polysémique entre leurs travaux.
© Michel Le Belhomme
L’obsession est récurrente dans les récits de Borges, l’homme est attiré par la maison, il finit par y rentrer, bien qu’il sache qu’il pourrait s’y perdre. Dans la nouvelle « Le livre de sable », la fascination pour un livre pousse un homme à ne plus pouvoir s’en détacher, à ne plus dormir, à vouloir bruler cet objet, et le laisser à un endroit où il n’ira plus.
La Bête Aveugle comporte plus de deux cents images. David Favrod titre ses séries par des termes japonais, comme plusieurs chapitres d’une histoire en cours. Leurs recherches semblent un besoin obsédant inassouvi, où il n’y aurait peut être ni réponse, ni fin mais une recherche, ou une tentative d'ouverture.
© David Favrod
Les deux artistes exposent régulièrement dans différents pays, leurs travaux ont été primés à de nombreuses reprises. David Favrod a obtenu en 2010 notamment le prix Aperture Portfolio Prize et le Swiss Award Design. Michel Le Belhomme à été, entre autre, lauréat du prix lacritique.org-Voies Off d' Arles 2010 et récemment d'une mention spéciale au prix "International Awards of Architectural Photography- Archifoto". Ils faisaient partie des artistes invités de la projection The Flood Wall en juin dernier à la galerie exp12.
Commissaire d'exposition Claire Laude
http://www.exp12.com