© Remi Rebillard
Remi Rebillard
Né à Paris mais établi aux Etats-Unis depuis de nombreuses années, Remi Rebillard a choisi Bruxelles pour sa première rétro- spective. Il nous reçoit chez lui et donne au public bruxellois, qu’on sait averti, l’opportunité extraordinaire de le découvrir en résidence à Forest du 18 au 28 avril 2013.
Photographe de mode, mais avant tout artiste, se consacrant pr- esque exclusivement à la recherche personnelle depuis 2009, il nous interroge sur le devenir de notre société par le biais de son autre passion, les femmes.
Remi Rebillard est un esthète, il nous a habitué à ses photos qui subliment la femme en ce qu’elle a de plus sensuel, avec quelques moments d’une grâce infinie, mais toujours, et de plus en plus, en soulignant la fêlure entre ces corps et le monde qui les entoure.
Il grandit à Paris dans un milieu d’artistes et de comédiens à une époque où rien n’est impossible.
Son goût de l’image nait, dit-il, d’une rencontre avec Jean Becker dont il fut plus d’un an, l’assistant, d’une admiration de jeunesse pour Giacobetti qu’il a la chance de côtoyer, et sans doute d’un voyage à Saint Barth dont il revient avec une certitude, celle qu’il sera photog- raphe. Il travaille pour les magazines européens, notamment Elle, Grazia and Uomo Vogue.
Il aime Sebastião Salgado, Sarah Moon, Irving Penn, Bill Brandt, Francis Giacobetti,, et surtout Paolo Roversi, dont les polaroids l’émeuvent, comme une survivance d’un siècle révolu. Plus tard, il aimera Javier Vallhonrat qui le surprend avec les poses travaillées de ses modèles.
© Remi Rebillard
Il quitte rapidement Paris et les catalogues de mode et s’établit avec sa jeune épouse américaine Cara Leigh à New York, ville dont il adore l’effervescence créatrice. Sa vie sera dès lors partagée entre NY et Miami, qui renait, tel un phénix, à partir des années 90.
Des lors, de catalogues en magazines, il poursuit cette passion de la photo, presque sans discontinuer. Un temps, il se pose, prend de la distance, juste le temps de devenir champion de ski nautique, mais c’est pour mieux revenir à son grand amour, cette fois de façon absolue : la photographie.
Avec les années, son travail s’est affranchi de ses références photographiques de jeunesse. Il développe son langage.
Maintenant, il nous raconte une histoire : celle de la civilisation post-industrielle, de la crise du rêve américain (The Sisters), de la désindustrialisation de l’Europe (Abandoned Factory), du réchauffe- ment climatique (It is not how to survive) de la solitude glaçante même dans un univers écrasé de soleil ,des chaises vides de la promenade des anglais à la petite surfeuse de Solitude by the Sea.
Bref, comment l’innocence et la beauté peuvent-elles survivre dans un monde qui part à la dérive ?
On reconnait un Rebillard à sa lumière particulière, le reflet dans l’eau, les vitres mouillées. Cette distance qu’il met entre ses nus et nous, c’est une forme d’élégance.
© Remi Rebillard
Il déteste les lumières très fortes, il aime les densités, tout est plus beau de toute façon, il aime montrer ce qui est beau, il aime la tristesse, l’émotion. Une photo avec une fille en train de rire, ne l’intéresse pas.
Alors, ses modèles ressemblent à des poupées désarticulées mais elles ne sont jamais ses jouets. Il y a tant de force dans leur re- gard. Elles ne sont pas mortes, bien au contraire. Elles sont si fortes que rien ne semble pouvoir les atteindre.
Elles disent au spectateur combien il leur est étranger et comme le monde, dans lequel elles sont mises en scène, leur est indifférent. Ce ne sont pas des femmes objets, ce sont des inquisitrices qui nous interrogent sur ce que nous avons fait du monde.
Il aime les nus qui disent, sans artifice, la fragilité de l’être, les modèles débutants et parfois maladroits. Devant son objectif, la jeune Kate Upton révèle de façon presque prémonitoire la Barbie qu’elle deviendra.
Les noms de celles, inconnues, qui servent son travail aujourd’hui, Alex, Lola, Eva, seront célèbres demain car Remi Rebillard est un créateur d’univers et il sait faire naître les étoiles.
Photographies et vignettes © Remi Rebillard