© JeAN-FrANC?OIS SPrICIGO
Galerie Agathe Gaillard 3, rue du Pont Louis Philippe 75004 Paris France
Mois de la photo 2012 Maison européenne de la Photographie 5/7 rue de Fourcy 75004 Paris France
(...) L’univers de Jean-François Spricigo n’est guère plus étendu que la distance où porte son regard. Il est fait de moments banals, de voyages peu lointains, de visages familiers, de présences amies, d’animaux dépourvus d’exotisme. Pourtant, c’est un monde du glissement, un monde où tout se transforme sans cesse ainsi que dans les mythes fondateurs des grecs, un univers où les lumières émergent de l’intérieur de l’image, à l’exemple des lueurs qui guident vers la mort ou le salut les héros des contes de fées.
© Jean-François Spricigo
Les images semblent émerger d’une profondeur d’ombre infinie, le mouvement qui les habite n’est plus celui de la photographie, pas encore celui du cinéma. Il est le mouvement du récit, de la narration, du conte. Toutes ces photographies se répondent, s’appellent, s’engendrent les unes les autres en un réseau potentiellement infini. Un réseau qui couvre son monde, comme si la carte se superposait exactement au territoire, comme si l’image transposait exactement le songe. Les photographies de Spricigo sont étoilées de fractures, parsemées de traces et d’accidents, d’éraflures et de manques. Il les accepte et en fait œuvre, le coup de dés du hasard n’a jamais été aussi présent que dans cette œuvre, pourtant maîtrisée de bout en bout.
© Jean-François Spricigo
(...) Son monde n’appartient qu’à lui, pourtant il le fait nôtre. Notre recherche d’une image fondatrice et originelle surgie droit de la mémoire et de l’enfance, trouve son accomplissement dans sa vérité à lui. C’est cela. « Ça a été » aussi pour nous. C’est en quoi son univers apparemment si restreint, si étroit touche à l’universel. Peu d’artistes possèdent l’apanage de faire disparaître en un seul geste la frivolité et la superficialité, d’aller droit à l’essentiel et de ne pas s’en écarter, dans un art aussi mince que celui de la photographie, nous découvrons la « profondeur de la peau » évoquée par Nietzsche.
Le monde intime que cette œuvre ouvre pour nous semble trouver son essence dans la dernière phrase écrite par Gérard de Nerval, le soir même de sa mort : « Ne m’attendez pas ce soir car la nuit sera noire et blanche. »
Anne Biroleau
Photos et vignette © Jean-François Spricigo