Trilogy - Semi privé © Emmanuel Madec
Emmanuel Madec est photographe et commissaire d'exposition. Après avoir travaillé dans la production de films documentaires, il se consacre exclusivement à la photographie et devient directeur artistique pour la Galerie Le Lieu et les Rencontres Photographiques, à Lorient. Il intervient régulièrement dans le cadre d'ateliers et de conférences ( musée du quai Branly, Paris ; Mai-photographie, Quimper ; L'image publique, Rennes ... ).
Sous le titre générique de cette exposition Un ciel plus loin seront montrées deux séries de photographies à l'Atelier du Midi à Arles en juillet prochain : This is not intimacy, trilogie composée de Revenir, A rather lovely thing et Semi privé (2005 – 2010) et Lebanon (2011), ainsi que des extraits de travaux plus récents, Affranchis et Persona. (2011-2012).
Depuis plusieurs années et à travers divers ensembles, le travail photographique d’Emmanuel Madec s'oriente vers l'idée de voyage et des références iconographiques que notre culture y associe. À sa manière et selon des indices donnés, chaque photographie convoque une mémoire, collective ou spécifique, que chacun des spectateurs est à même de projeter... Les découvertes se font au fil des récits qui s’inventent et dans la fluidité des pièces proposées. Ses photographies forment des ensembles cohérents et sensiblement riches. La restitution d'emblèmes entre alors en dissonance ou en résonance avec la culture du regardeur.
Au début, qu’il en soit de son intérêt pour l'iconographie du Voyage Américain et de ses mythes, du Journal Photographique construit de métonymies, d'un déplacement sur un territoire étranger, les préoccupations d’Emmanuel Madec se focalisent aujourd’hui vers les idées d’espace et d’itinérance. Le fil rouge de sa démarche s'établit sur l'appréhension des territoires, toujours autour de la question d’une certaine appropriation des lieux ; l’acte photographique faisant foi par son sujet et par son cadre pour re-limiter un espace, lui donner une force, à mi-chemin entre le détail et la vue d'ensemble. On est placé alors devant des fragments de visible, affichant une esthétique du découpage.
Afin de ne pas restreindre cette notion à la seule question topographique, il en fait un champ d’investigation tant géographique que psychologique. Dans cette perspective, ses séries photographiques sont conçues d'images dont le statut pourrait être apparenté à celui du documentaire, mais en cherchant le détour poétique du documentaire autofictionnel.
Trilogy - A rather lovely thing © Emmanuel Madec
Lebanon
« Le Liban est un petit pays, coincé entre la Méditerranée, la Syrie et Israël. De 1975 à 1990 une guerre civile implacable s’y est déroulée : elle a laissé exsangue ce territoire et a cristallisé dans la mémoire collective, l'image d'un pays perpétuellement en proie à la guerre. Bien que des tensions ressurgissent régulièrement entre les différentes communautés catholiques et musulmanes, comme avec les pays voisins, ce territoire aux nombreuses identités, se situe bien loin des préjugés que l'on conserve sur lui. En reconstruction permanente, abritant une mixité ethnique et communautaire, le Liban occupe une position singulière, entre orient et occident. (Extrait). »
Dans Lebanon, on peut relever une distance qui est bien souvent à mi- chemin entre le détail et la vue d’ensemble. On se place alors devant des fragments du visible, dont la réalisation s’est opérée avec une esthétique du découpage. Les paysages sont souvent enfermés dans des images pleines qui portent en elles la notion de seuil, d’obstacle. D’une certaine manière la construction de ces images produit une injonction vers un ailleurs, hors-cadre. Il s’agit bien de la notion de frontière, de limite, qui est ici symbolisée et aussi, de l’accès à l’imperceptible.
Les personnes photographiées regardent bien souvent hors-champ, à l’endroit ou notre vision face à la photographie se trouve empêchée. Ce que les photographies occultent et à la fois suggèrent, amène notre imaginaire à prendre le relais du constat. Il y a perturbation et léger déséquilibre dans le jeu entretenu avec ces frontières. Ici, l’écriture photographique souligne la posture que j’ai adoptée. » Emmanuel Madec (2011)
Trilogy
« « Trilogy » est une variation en trois volets sur le quotidien : « Revenir » (réalisé avec un appareil rudimentaire, cette série livre l’expression d’un état psychologique), « A rather lovely thing », « Semi privé ».
Entre le journal et le road movie, ce travail forme trois carnets de voyage produits sur un territoire restreint. Si le thème reste le même dans chaque ensemble, les différentes esthétiques adoptées portent des marques propres, qui permettent d'associer les images à leur série d'origine.
Les structures de ces séries sont très modulées et laissent une large place aux ellipses dans la narration. Elles sont vecteur de ruptures, tout comme elles amorcent des images mentales, qui participent à l'interprétation du récit.
« This is not intimacy » pose également la question de la part de fiction intégrée dans le medium photographique. » Emmanuel Madec
A rather lovely thing
« « A rather lovely thing » est composée comme une chanson que l'on fredonnerait entre ses lèvres, avec ses refrains, ses couplets et ses désaccords. » Emmanuel Madec
Lebanon © Emmanuel Madec
Photos et vignette © Emmanuel Madec