P32, 2010 © Sébastien Pageot / Courtesy Modemartgalerie
Cette proposition créative du photographe-plasticien Sébastien Pageot a pour objet le paysage urbain. Mais ne nous y méprenons pas, ici, point de panoramas électrifiés ou de vertigineuses cascades de gratteciels. Non, Sébastien Pageot semble vouloir s'écarter du spectaculaire en offrant à nos yeux des clichés qui rendent hommage à la finalité primaire de la photographie : représenter le réel. Il cadre un parking, capte la vue d'un entrepôt ou d'un bâtiment industriel.
Pourtant, lorsque l'observateur dépasse la rudesse de ces « non-lieux de l'architecture urbaine », l'onirique et le fantasmé font surface. Ou refont surface, devrions-nous dire. Car l'artiste prend ici le parti de nous leurrer en imaginant des lieux possibles matérialisés par le biais de simples maquettes de cartons ou d'objets divers. Dès lors, la photographie ne se contente pas de sublimer le réel, elle crée une illusion en flouant la limite entre le réel et l'irréel. Et les disciples de Saint Thomas auront beau croire ce qu'ils voient, ces « faux-tographies » ne représentent jamais vraiment ce qu'elles figurent.
Pour exemple, le panorama d'immeubles de l'installation King Kong n'est pas un cliché d'une ville de type nord-américain, mais des milliers d’agrafes savamment agencées. Aussi, le projet Veduta utilise la lumière naturelle pour transformer des constructions de carton en grandes bâtisses vénitiennes. Urbanscapes est une exposition de photographies en faux-semblant aussi réels que précis. Dans une société où l'image est reine, ce travail artistique « interroge le médium photographique sur ses capacités à nous mentir », à nous faire croire. À quelle objectivité pouvons-nous nous fier lorsque ce qui figure se révèle être une illusion ?
P55, 2010 © Sébastien Pageot
« J'ai choisi de m'intéresser pour cette série à ces non-lieux de l'architecture urbaine que sont les parkings. Leur importance qualitative dans l'espace urbain quotidien n'a d'égale que l'indifférence que nous accordons à ces lieux. Nulle attention aux formes architecturales, aux couleurs. Et encore moins de considération ou d'attrait pour leurs concepteurs. Tout juste repère-t-on un numéro, une lettre pour mémoriser l'endroit où l'on gare son automobile (d'où le titre relativement anonyme de ces images P -pour parking- accolé à un simple numéro de série). »
Vignette : P32, 2010 © Sébastien Pageot / Courtesy Modemartgalerie