© Mayumi Hosokura, série KAZAN, 2009-2011, courtesy galerie LWS
Les recherches des deux artistes échappent à toute démarche documentaire, leurs photographies ne font pas état de la réalité mais s’imposent plutôt comme un moyen de création, voire de narration. D’une part, le travail de Yumiko Utsu définit les frontières de mondes nouveaux, attestant de leur existence et de leur permanence. Quant à celui de Mayumi Hosokura, il appelle à un prolongement des sens et ouvre la porte à un dialogue avec le monde; il est la transcription et l’abstraction de paysages émotionnels et spirituels.
Yumiko Utsu est une photographe visionnaire, capable de projeter son public dans des scènes surpeuplées où cohabitent les pôles opposés d’attraction et de répulsion. Poissons, denrées alimentaires, poupées, tissus et gravures désuètes alimentent ses images et leur offrent un contenu et un sens inattendus.
Ces éléments familiers sortis de leurs contextes et détournés se voient confier des rôles inhabituels dans des mises en scène aussi ludiques que profanatoires. Leur accumulation trace un chemin, comme un itinéraire centrifuge né de l’imaginaire de l’artiste avec une liberté qui outrepasse largement les limites franchies par les Dadaïstes.
Il en résulte à la fois un sentiment de familiarité, de déconnection et d’ouverture. Sorti de son contexte initial, le familier nous entraîne alors dans de nouveaux mondes, surréels, iconiques, à la fois ambigus et insaisissables, dans un voyage authentique à travers un univers fantastique, peuplé de créatures tout droit sorties d’une arche inédite, l’Out of ark.
© Yumiko Utsu, série OUT OF ARK, 2009, courtesy galerie LWS
Les thèmes de prédilection de Mayumi Hosokura sont proches de la photographie contemporaine et particulièrement d’une certaine école de la représentation de la vie privée, subjective et hédoniste, très sensuelle et extrêmement connectée à la nature. Ces thèmes révèlent de fortes traces d’une sensibilité matérielle et chromatique, plus en phase avec le caractère immédiat et délicat, également visible chez la plupart des photographes contemporains japonais.
Le thème sous-jacent de la série Kazan, projet auquel l’artiste s’est dédiée ces quatre dernières années et récemment publié dans un ouvrage éponyme, est une tension permanente opposant les éléments de la vie à ceux de la nature : le caractère éphémère de la jeunesse physique, des jeux et des relations face à la pérennité de la nature, des minéraux et des plantes.
© Mayumi Hosokura, série KAZAN, 2009-2011, courtesy galerie LWS
Les pistes lancées par Mayumi Hosokura sont évocatrices et séduisantes et veillent à équilibrer minutieusement les rapports entre hasard et mise en scène, spontanéité et calcul. Au moyen d’une intense recherche formelle et chromatique, ses images sont composées comme un appel à la compassion, pour atteindre l’imaginaire du spectateur, d’une sensation à l’autre, du réel à l’imaginaire.
Vignette : © Mayumi Hosokura