© Alain Ceccaroli
Alain Ceccaroli abandonna ses activités professionnelles il y a moins de 10 ans pour consacrer sa vie à la photographie. Depuis lors, il poursuit une recherche exemplaire. Des Alpes aux plateaux d’Andalousie, du littoral normand à la Corse, de la Méditerranée à la Guadeloupe, il s’efforce, par les moyens de l’art de nous rendre présent un réel de plus en plus insaisissable, d’en délivrer - comme dit Yves Bonnefoy - la part visible. Son travail n’offre pas un spectacle du monde mais une expérience de celui-ci. Son objectif n’est ni l’efficacité descriptive, ni la pure réussite plastique. Il est la découverte de l’équilibre entre la nécessité de ressaisir la réalité et celle de sa transposition en symboles. La part de description, inhérente à l’enregistrement photographique, n’est nullement négligé ; elle n’est plus une fin. Elle est le moyen de transcription d’une sensation, non de reproduction d’un fait.
Ses travaux surmontent la distinction traditionnelle entre document et fiction, objectivité et création et retrouvent cette spécificité de la photographie, depuis l’origine de son histoire, au-delà des illusions du réalisme et des manipulations formelles. Et Ceccaroli incarne bien cette conscience des artistes qui, par la nature même de leur médium - l’enregistrement optique - se servent de la photographie pour restituer le réel autant qu’ils se servent du réel pour créer des œuvres photographiques.
Dans ces œuvres, nulle complaisance de l’anecdote, de l’effet, du sentiment ; nulle dispersion de la pensée ; constante économie de moyens ; constante astreinte à la même discipline ; constante fidélité au même objet.
Depuis les grandes vues panoramiques qui caractérisaient ses premiers travaux, jusqu’aux approches récentes plus frontales de matières et de formes élémentaires des sols, des pierres, des végétaux, Ceccaroli a constamment approfondi la même exploration. Il n’est pas un adepte du rêve les yeux ouverts et ne recherche pas la " belle image ". Le besoin auquel il s’efforce de répondre n’est ni celui de la documentation, ni celui de l’émotion esthétique. Il ne vise aucune originalité pour elle-même. Il veut se réapproprier un monde dont il redoute d’être séparé. Il désir lui réappartenir. C’est ainsi qu’il contribue aux côtés des " aménageurs ", à recréer cette maîtrise des liens qui doivent nous unir à ce que nous nommons désormais " l’environnement" ; liens culturellement, physiquement, toujours plus menacé de rupture.
Vignette : © Alain Ceccaroli