© Jacques Olivar
Young Gallery 75b Avenue Louise 1050 Bruxelles Belgique
«Bien, disons que vous êtes un voyageur de commerce, il est 9 heures du matin et vous filez droit vers Austin, Texas. Vos idées se bousculent. Tout va trop vite. Trop de choses à régler. Peggy Sue’s Diner n’est qu’à un mile d’ici. Il vaudrait mieux s’arrêter prendre un café, s’éclaircir les idées et faire le point à propos du programme chargé de la journée. Parking, contact coupé.
Le "diner" semble vide à cette heure-ci. Le saxo de Gerry Mulligan crépite sur les ondes courtes, une jolie femme drôlement bien fringuée est assise seule à une table près de la fenêtre. Son regard mélancolique semble perdu dans un très lointain ailleurs. C’est à se demander ce qu’elle fait à cette heure-ci habillée de cette façon-là. Est-elle en fuite après une querelle d’amoureux, un drame conjugal ou une fête branchée où tout a mal tourné? Est-elle à la recherche de solitude, a-t-elle une peine de cœur. De toute évidence, vous n’oseriez jamais lui adresser la parole, et puis le temps presse, vous devez être à l’heure à votre réunion. Ainsi, vous partez sans réponse à ces questions qui vous vrillent l’esprit. Qui était-elle et quel était ce trouble dans son regard ?
Just Like a Woman © Jacques Olivar
Ceci est le lever de rideau, l’introduction à toutes mes images. Vous devenez le témoin et le voyeur en même temps. La distance esthétique entre la modernité sophistiquée de cette femme et le cadre fâné par le temps de ce rade au Texas est l’élément clé de l’émotion intemporelle que j’amène à mes images. J’essaye toujours d’accorder deux histoires différentes. Il y a l’histoire propre au lieu, son atmosphère, la lumière, les couleurs, et celle de cette femme, son regard, son état d’âme, son attitude, ses vêtements.
J’aime trouver pour mes images le lieu le plus inattendu, une décharge, un vieux "diner", une rue solitaire dans une ville fantôme ou la simple poésie d’une station service. Puis une fois le décor dans mon viseur, je le bouscule, le rudoie, puis le ravale, pour bien mettre en évidence le glamour de la scène.»
Jacques Olivar
Vignette et image : © Jacques Olivar