© Nicolas Frémiot
« Je photographie donc je marche! s’inscrit dans le cadre de la Manifestation « l’Art contemporain sur la Côte d’Azur, un territoire pour l’expérimentation. » Elle a été organisée conjointement avec le Théâtre de la Photographie de Nice (TPI). Le deux structures présentent exposition dont la thématique est identique : l’investigation et l’observation du territoire au moyen de la marche. Quelques œuvres de Nicolas Frémiot seront présentées à Nice, alors que les clichés de Gabriele Basilico, Galith Sultan et Lionel Bouffier feront partie de l’exposition mouginoise sur proposition TPI et de Marie-France Bouhours.
Nicolas Frémiot avait depuis quelques temps émis le vœu de réaliser une exposition pour le compte du Musée de la Photographie. Son propos était de traverser la nature de part en part. Marcher à travers le Mercantour constituait certes une belle option de projet, mais demeurait tout de même un peu éloignée des centres d’intérêt du Musée de la Photographie.
A la question « Alors, pensez-vous que je pourrai exposer à Mougins à 2011 ? », nous répondions par la négative. En 2011, le musée est intégré au projet « l’Art Contemporain sur la Côte d’Azur ». Comme s’il ne manquait qu’une marche à gravir pour entrevoir le champ des possibles, la participation de Nicolas Frémiot semblait compromise, n’ayant aucune relation avec la Côte d’Azur. Et puis, chemin de la conversation faisant, l’idée est venue. Pourquoi ne pas réaliser une marche reliant les lieux participants à la manifestation ?
Cette exposition aurait ainsi multiples ramifications sémantiques dans sa conception et sa destination. Elle mettrait en valeur le territoire, les acteurs de celui-ci et leurs réalisations. Les structures muséales et les œuvres qu’elles conservent seraient instituées comme étapes, comme but à atteindre quotidiennement.
La photographie retournerait à sa source originelle, se voulant l’instrument du reportage. Elle reprendrait en même temps cette définition que Baudelaire lui avait péjorativement attribuée en la qualifiant « d’humble servante des arts. » Mais avant tout, ce travail s’inscrit dans la logique de la performance.
Les marcheurs ont en effet pour habitude d’établir des itinéraires dans la montagne, dans la forêt, dans ces lieux au sein desquels il est bon de se régénérer. Ici, il s’agira d’emprunter les chemins qui ne sont plus adaptés à l’homme non assisté d’un véhicule. L’artiste se placera ainsi dans des conditions qui ne sont pas les plus appropriées à l’activité de la marche, déclenchant ainsi chez lui une forme de tension qui peut s’accentuer au grès des aléas climatiques.
Cette aventure s’est déroulée entre le 22 septembre et le 5 octobre 2010. Elle a relié Mougins à Menton. Entre ces deux points géographiques se sont révélés au regard de l’artiste les Musées Nationaux des Alpes Maritimes, les grandes structures institutionnelles telles que le Mamac, le TPI, la Villa Arson, la Fondation Hugues ainsi les galeries privées d’avant garde qui font la fierté culturelle du département. En chemin, le photographe s’est attaché à montrer le territoire sous l’angle des paradoxes qui fondent sa singularité. Une nature aussi accidentée que généreuse et esthétique. Au sein de ces paysages parfois féeriques, ont été installées d’innombrables infrastructures. Celles-ci ont été intégrées avec plus ou moins de réussite esthétique…
La photographie s’engage ici dans une démarche oscillant entre mouvement et fixité. Sur certains clichés de Nicolas Frémiot, le mouvement est suggéré mais la plupart ses images montrent bien le temps d’arrêt. Ils expriment une certaine surprise face à la découverte d’une scène, d’un « tableau », se révélant subitement à son regard. Un rien peut faire une photographie, surtout dans la nature, Nicolas Frémiot ayant eu « droit » à un espace de respiration via le chemin de randonnée l’acheminant de Carros à Aspremont. Un bloc de roche peut présenter des qualités plastiques digne d’une sculpture, avec ses teintes et ses veinules et devenir l’objet d’une installation lorsqu’elle s’insère dans la composition.
Avant la prise de vue, un mouvement est naturellement engagé par la fonction de la marche, avec tout ce que cela implique physiquement lorsqu’il s’agit d’effort de longue haleine. Une respiration différente, un rythme cardiaque accentué, un flux d’endorphine, un esprit qui vagabonde. On sent très bien, suivant le lieu, la différence d’état d’esprit qui peut animer le photographe. Au sein de la nature, on prend le temps de s’imprégner de la magie du paysage. Dans les contextes urbains et périurbains, le bruit, la circulation, la sensation de danger pousse à la rapidité de l’acte et à la poursuite de la marche. Ceci est très palpable dans la l’œuvre de Nicolas Frémiot. »
Olivier Lécine, Commissaire de l’exposition
© Nicolas Frémiot, Vence Cinquième jour 26 septembre 2010
Né en 1964 à Neuilly-sur-Seine, Nicolas Frémiot vit et travaille à Paris. Photographe depuis la fin des années 1980, il s'est d'abord attaché au portrait pour questionner les rapports sociaux. En 1991, il réalise sa première déambulation dans les îles bretonnes qui inaugure alors un nouveau rapport aux paysages, qu'il traverse à pied, pour mieux s'en imprégner pour mieux les recréer selon son propre désir. Son travail s'inscrit dans la lignée de photographes tels que Hamish Fulton ou Thierry Girard qui créent des œuvres grâce et à partir de leurs déplacements dans la nature. Il vagabonde selon des itinéraires fantasmés ou hasardeux. Il a participé à de nombreuses expositions collectives et personnelles. Lauréat de plusieurs prix et aides à la création (Lauréat pour l'exposition du Prix Kodak de la Critique Photographique en 1999, Aide à la création du Musée d'art contemporain Val de-Marne/ Vitry-sur-Seine en 2005, etc.), il est présent dans de nombreuses collections privées et publiques, dont le Fonds Départemental d'Art Contemporain de Seine St Denis, la Bibliothèque Nationale de France...