Avec The Americana, M+B et Colette présentent une exposition qui célèbre l'Amerique, avec des artistes dont le travail va de la photo documentaire, mettant en lumière des moments-clés du 20ème siècle, à des œuvres contemporaines plus conceptuelles. En creux, l'exposition montre donc l'évolution de la photographie et de l'art américain depuis les années 1950.
Les travaux de Lisa Jack, Le Roy Grannis, Hugh Holland, Joseph Szabo et Hunter S. Thompson sont une vitrine des mouvements des années 1960-70. Grannis et Holland ont choisi comme forme de rebellion le surf et le skate, symboles de la côte Ouest américaine. Szabo, leur homologue de la côte Est, et son travail sur la Jonas Beach des 70s, illustre le sentiment qui veut que tout soit possible, avec, paradoxalement, cette angoisse existentielle au coeur l'identité d'un adolescent Américain.
Simultanément rebelle et fraîchement jeune, les fans de bains de soleil collectifs, surfers et patineurs, ont commencé à se rassembler en identités cohérentes pour former des subcultures. Ils célèbrent leurs fortes individualités et leurs fortes identités de groupe, tels les Hells Angels photographiés par Hunter S. Thompson. Les portraits de Lisa Jack, cependant, décrivent une culture différente des années 70, une culture combinée aux associations étudiantes, tel les portraits du Président Barack Obama à 18 ans, images à la fois de la culture libérale de la jeunesse des années 70 et de la contre-culture des campus. De manière ironique, alors que les images de Jack dépeignent la promesse du lendemain et capturent l'incertitude de la jeunesse, vingt ans après, elles furent considérés pendant la campagne présidentielle comme une promesse de renouveau pour les Etats-Unis.
Typiquement américaine, l'idée de «promesse» infiltre aussi les nombreux pans de l'art contemporain. Pour Mike Brodie, la promesse et la poursuite de la liberté se trouvent dans son mode de vie passager, en n'étant jamais attaché à un foyer «maison». La capacité de disparaître en tant qu'anonyme dans l'étendue de l'Amérique fait ainsi écho aux premiers penseurs du pays comme Henry David Thoreau.
© Mike Brodie.
La promesse de la route est dépeinte dans les portraits d'Andrew Bush, célèbrant la culture de la voiture en Californie. Alex Prager met en exergue l'obsession de la promesse, célébrée dans l'exposition New Photography 2010 au MoMA où Prager s'inspire du film noir et d'autres techniques cinématographiques, échangeant le contexte ensoleillé de Los Angeles contre une scène mystérieuse et fragmentée. De même, Matthew Porter compose ses images selon les scènes fantastiques des films classiques d'Hollywood. Il complexifie ainsi nos relations avec la promesse, car il combine la notion de découverte et d'Ouest avec des images du Hindenburg et de l'Allemagne nazie. Moins explicites, les images kaleidescopiques de Lisa Eisner remarquent avec espieglerie le phénomène New Age se développant en Californie, puis envahissant l'ensemble des USA. Avec l'idée de promesse, propre au monde occidental, comme thême commun, cette exposition est donc une réflexion sur l'évolution de la photographie et son approche comme moyen de définition de “l'Americana”, et de ses nuances californiennes. Il ne s'agit pas ici d'une simple célébration, car ce travail démystifie également les mythes américains, tout en proposant un nouveau discours sur ce que c'est qu'être Américain.
© Matthew Porter
Fondée en 2005 par Benjamin Trigano, la galerie M+B tache de découvrir et d'exposer le travail d'artistes emergeants et établis tout en s'engageant sur la nature changeante de la photographie. Bien que le premier objectif soit la photographie contemporaine, M+B expose également des travaux sur les périodes critiques du 20ème siècle.
Vignette © Hugh Holland.