Médiathèque François Mitterrand - Lorient 4 place François Mitterrand 56100 Lorient France
Vingt-quatre ans après la catastrophe, les cimetières d'engins militaires et la centrale de Tchernobyl en Ukraine font l'objet d'un pillage en règle. Chaque semaine, près de deux cents tonnes de métal radioactif quittent la zone d'exclusion. Enquête sur le trafic de métal contaminé de Tchernobyl.
L'exposition est présentée en partenariat avec l'Ecole Supérieure d'Art dans le cadre d’un atelier de recherche et de création "L'Art à l'épreuve du reportage" encadré par Daniel Challe et Pierre Collin pour des étudiants des 3/4/5èmes années.
Guillaume Herbaut avait 16 ans lors de la catastrophe de Tchernobyl. Le photojournaliste qu’il est devenu se dit avoir été particulièrement marqué par cet événement. Depuis 2001, il s’était d’ailleurs rendu sur le site à quatre reprises (pour quatre reportages). Il ne pensait plus y retourner. C’est une bourse du Centre National du Cinéma pour un webdocumentaire qui le décide à partir une nouvelle fois en compagnie du journaliste-rédacteur indépendant Bruno Masi (ancien de Libération) en 2009. Les deux journalistes (reporters) ont au départ un projet très mémorialiste, didactique autour de la ville de Prypiat, la plus proche de la centrale évacuée au lendemain de l’explosion de la centrale. Ils ont vite cependant la certitude de n’avoir rien de nouveau à raconter sur Tchernobyl jusqu’à ce qu’une rencontre dans un bar situé au bord de la zone interdite leur fasse prendre conscience de l’ampleur du trafic de métaux radioactifs. De retour à Paris, ils présentent quelques clichés à Paris-Match qui accepte de financer un reportage complet .
Bruno Masi explique : « Vingt-quatre ans après la catastrophe, les cimetières d’engins militaires et la centrale de Tchernobyl en Ukraine font l’objet d’un pillage en règle. Chaque semaine, près de deux cents tonnes de métal radioactif quittent la zone d’exclusion. Dans le tumulte qui a suivi l’explosion du réacteur 4 de la centrale de Tchernobyl en 1986, les autorités ont pallié au plus pressé : enterrer certains villages très contaminés. Créer ça et là des tombeaux où devaient rester confinées pour des siècles des tonnes de métaux radioactifs. Entourer Pripyat d’une clôture métallique pour éviter qu’elle ne soit livrée aux pillards. Aménager des plaines surveillées pour entreposer les véhicules exposés aux radionucléides. Même élaboré dans l’urgence de l’évacuation, le dispositif de confinement se voulait exemplaire. Mais un quart de siècle plus tard, la plupart des cimetières ont été vidés. Les engins militaires ainsi que des pans entiers de la centrale sont systématiquement décortiqués. Pripyat, la ville où logeaient les ouvriers de la centrale et qui fut évacuée au lendemain de l’explosion, est démontée centimètre par centimètre […]. Officiellement, l’Agence Internationale de l’Énergie Atomique basée à Vienne en Autriche dit « ne pas être au courant ». Mais depuis la chute de l’Union soviétique et l’indépendance de l’Ukraine en 1991, ce vaste territoire est devenu une zone affranchie, avec ses propres règles et ses luttes d’influence, ses entreprises de recyclage et ses trafics en tous genres. Un État dans l’État, doté de son or noir : le métal. […] Selon plusieurs observateurs, huit millions de tonnes de métal étaient disséminées sur l’ensemble du territoire de la zone d’exclusion après l’explosion. Il n’en resterait aujourd’hui plus que deux millions, représentant une valeur marchande d’un milliard de grivnas (100 millions d’euros). »