Galerie de l'Europe 55 rue de Seine 75006 Paris France
Après un livre très remarqué et une exposition sur « Paris sous la pluie » à l’automne 2008, Christophe Jacrot réitère son projet artistique autour d’une série de photos basée sur une thématique qu’il affectionne tant, les intempéries en milieu urbain. Ici, on découvre trois grandes villes de l’hémisphère nord sous les affres de la météo hivernale ; Paris, New York, Chicago.
Une manière pour Christophe Jacrot de suivre les pas de ces maîtres avec le fabuleux portrait de Giacometti sous une pluie battante pris par Henri Cartier-Bresson ou cette photo de Elliot Erwitt d’un homme sautant par-dessus une flaque d’eau du Trocadéro.
« Suite à une commande d’images de Paris sous le soleil pour un guide touristique, et devant un temps désespérément pourri, que m’est venu cette idée de traiter les grandes villes sous les intempéries explique-t-il. J’adore le mauvais temps et ses subtiles lumières, ainsi que l’influence qu’il a sur nous. Les Parisiens ont été nombreux à acheter le livre consacré à Paris et ses tirages.
Dans ce nouvel opus, le photographe Jacrot balade son objectif sous la pluie mais aussi la neige des villes de Paris, New York et Chicago.
Rues presque vides, enseignes multicolores, paysages urbains déformés sous les vitres ruisselantes des chambres d’hôtel ou des magasins, Christophe Jacrot nous faire redécouvrir nos mégalopoles comme une nature sauvage et insolite.
A découvrir ses villes sous des jours si peu propices à la promenade, l’architecture urbaine révèle une poésie insoupçonnée, dans une approche photographique oscillant entre humanisme et pictorialisme.
Sublimer une ambiance peu photographiée, réveiller le « romanesque » de la pluie ou de la neige, regarder ce qui n’est pas visible sous des conditions inhabituelles, telle est la démarche du photographe.
La mélancolie de la pluie, la féérie de la neige, l’ambiance extraordinaire d’un ciel bas et lourd construisent un univers qui emporte l’imaginaire du spectateur.
Christophe Jacrot capte des silhouettes fantomatiques déambulant dans les profondeurs de la ville, dont les mouvements obéissent aux aléas de la pluie ou les difficultés que provoque la neige.
Chicago ou New York sous la pluie ou la neige révèlent une magie aussi forte que Paris sous la pluie. Le cadre, la lumière et la composition sont au service de la narration comme au cinéma, pour nous raconter une ville comme on ne la voit jamais, à travers des instantanés singuliers transfigurés par ces effets mouillés ou le voile neigeux, à moins que le photographe ne préfère se concentrer sur l’apparence nouvelle que revêt un gratte-ciel lorsque la neige tombe dru.
Christophe Jacrot emprunte à Willy Ronis cette phrase dans laquelle il se retrouve pleinement : « Il y a un vrai plaisir à trouver la place juste, cela fait partie de la joie de la prise de vue et c’est parfois aussi un tourment parce qu’on espère des choses qui ne se passent pas ou qui arriveront quand vous ne serez plus là. »
Et il ajoute : « combien de fois j’ai prié pour que quelqu’un passe là où j’ai décidé. « Heureusement cette ville déborde de monde. Sans vie, je m’ennuie. Une ville déserte n’est pas une ville, même si j’aime isoler mes personnages. »
Je m’amuse encore du regard des passants, placé dans une étrange position en parka de pluie, emmitouflé sous un vêtement le protégeant, parfois presque allongé sans bouger dans un déluge de pluie. L’appareil est protégé par un sac étanche mais l’humidité et la différence de température entre le dedans et le dehors provoque une condensation qu’on ne peut éviter.
J’ai un outil précieux : la carte radar de la météo qui me permet de ne pas poireauter des heures dans la rue à attendre l’hypothétique averse.
Certaines vues de Paris ou New York avec effets de pluie au premier plan sont prises depuis diverses chambres d’hôtel ayant fait l’objet d’un repérage mais que c’est agréable de ne pas être trempé jusqu’aux os.
Si je devais ajouter une dimension à ces photos, ce serait le son, indescriptible à la fois violent de cette pluie qui s’abat sur le bitume de la ville et qui impose son silence sur l’infernal bruit de la ville »