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Lors de l’élection du président Ahmadinejad en 2005, j’ai entrepris un projet sur la société iranienne. J’avais le sentiment que l’arrivée de ce chef d’Etat à la fois populiste et extrémiste allait rapidement creuser un fossé entre l’Iran tel qu’il était perçu par l’Occident, et le pays tel que je le connaissais.
Je me suis donc mis à tirer le portrait d’une société bien plus vaste, humaine et complexe que les stéréotypes qui la plombent depuis la Révolution islamique. J’ai commencé à explorer l’esprit iranien et l’identité nationale à travers le prisme de sujets individuels.
C’est le caractère théâtral et la complexité de la société iranienne qui m’ont particulièrement attiré : la profonde croyance religieuse des Iraniens en dépit de l’usage retors de la religion par le régime ; la confrontation constante entre modernité et tradition, souvent au sein d’une même personne ; la recherche obsessionnelle de la réussite personnelle dans un système dominé par des valeurs collectives et dans lequel la souffrance est affichée comme qualité.
Je voudrais montrer que les Iraniens peuvent être étonnants, loufoques, audacieux, insolents et insatisfaits, et que par conséquent, ils ne constituent pas un bloc homogène, comme le régime aimerait nous faire croire.
J’ai travaillé dans un climat d’événements politiques importants : l’émergence de l’Iran comme puissance nucléaire et régionale ; le 30e anniversaire de la Révolution islamique ; la réélection frauduleuse d’Ahmadinejad ; l’apparition du Mouvement vert et sa violente répression.
C’est à ce moment précis de l’histoire où l’Iran se retrouve au centre géographique, mais et aussi stratégique, de la guerre en Iraq et en Afghanistan, et à l’origine de beaucoup de tensions entre les Etats-Unis et la Chine, qu’un regard plus personnel, plus intime sur son peuple prend toute son importance.
De plus, ayant vécu les événements de juin 2009, et suivant au jour le jour et, à mon regret, à distance, la situation en Iran, j’ai commencé à collectionner les images prises par les Iraniens qui témoignent de l’acharnement brutal envers le Mouvement vert. Ces photos, souvent prises avec des téléphones mobiles ou des appareils amateur, sont vite devenues l’unique preuve visuelle de la violence post-électorale. Ces images se sont disséminées à travers le monde grâce à l’Internet et sont souvent portées au rang d’emblèmes, ce qui marque une nouvelle ère du journalisme citoyen. Une sélection de ces images sera également exposée.