Dans la photographie d’aujourd’hui, le nom de Mimmo Jodice rime avec celui de Naples. Il n’a jamais voulu quitter cette ville qui ne ressemble à aucune autre. Il n’a jamais remis en question l’attachement qu’il lui voue, alors que de nombreux photographes de sa génération ont préféré rejoindre le nord de l’Italie, là où les offres de travail, notamment pour la presse, étaient plus alléchantes. Aujourd’hui, au terme de près d’un demi-siècle de production photographique intensive - ses premiers travaux datent du milieu des années soixante -, après des immersions dans les paysages urbains les plus variés - de Paris à Sao Paulo -, le lien avec Naples est toujours aussi vivant : source d’images nouvelles ou relecture de travaux plus anciens. L’exposition « Naples intime » met en lumière une constance du regard du photographe, celui qu’il porte ici sur des intérieurs et des décors qui, même s’ils lui sont familiers, détiennent encore des surprises. « Il suffit de passer le coin d’une rue, de pénétrer dans une cour, une église ou un cloître, pour plonger aussitôt dans une réalité complètement différente : le vacarme et le chaos du quotidien faisant place au silence et à des images aussi imprévisibles que mystérieuses » écrit-il.
La surprise se mêle au ravissement, aussi bien dans des lieux chargés d’art et d’histoire que dans des endroits plus ordinaires, voire abandonnés. Et c’est la manière dont il capte un surgissement de la lumière qui le plus souvent crée l’événement, « fait » l’image ; c’est le noir et blanc, dont il maîtrise plus que n’importe quel autre artiste les valeurs, qui rythme la composition. Mais au delà de ses indéniables qualités se déployant sur le registre plastique, Mimmo Jodice manifeste également un talent qui pourrait s’apparenter à celui du poète : son oeil capte des rencontres inattendues, entre les objets de l’art religieux, si présents à Naples, et ceux du quotidien le plus trivial. Si bien que ses images sont comme un théâtre à la croisée de différentes époques : le voyage dans le temps auquel Mimmo Jodice nous convie est aussi baroque que les réalités qu’il découvre.
Gabriel Bauret
Commissaire de l’exposition