Maillon-Wacken Place du Wacken 67000 Strasbourg France
Être enfant en Russie ou en Ukraine c’est entrer en survie dans un univers parcouru de violences, faites d’expériences éthyliques, de bizutages sexuels, d’avortements, du sida, de la pornographie... Il n’est pas de culture européenne qui tienne en si peu de considération la vie.
Des ghettos, des casernes, des banlieues, des orphelinats, des prisons, des bordels … Eric Vazzoler rapporte depuis 1993 des images qui évoquent une déchirure commune et soulignent le défi dans les regards de la jeunesse des ex-républiques soviétiques. Il s’attache à révéler la dignité et l’espoir de ces icônes empreintes de l’arrogance et de l’insoumission d’être jeune à l’adresse de ceux qui ne le sont plus : geôliers, pollueurs, clients à putes, prêcheurs du petit écran, photographes…
Malgré les bleus de l’enfance, quand la jeunesse
se tient fière et droite.
Que des bordels, des casernes, des banlieues, des orphelinats, des prisons, des ghettos, des régions écologiquement sinistrées, des îlots cultuels, des camps d’entraînement pour sportifs aux corps violentés ...que de ces lieux puissent être rapportées des images qui évoquent une déchirure commune et qui attestent du défi dans les postures et les regards de cette jeunesse, j’y vois là mon credo.
Pourquoi s’attacher à fixer le visage d’une jeunesse déclassée et rageuse dans des lieux dont il est commun de penser que l’espoir l’a abandonnée là, et tout particulièrement en ex-Union soviétique ?
Je dispose de deux éléments pour tenter de répondre:
Mon enfance tout d’abord, singulière parce qu’entourée d’infirmes, parent et amis dont le plus dur des combats ne fut pas mené contre une motricité déficiente mais contre le regard des autres sur cette différence.
Ensuite l’Ecole Nationale de la Photographie d’Arles n’ayant pas voulu de moi, je me suis inscrit en russe à « Langues O » : ce qui revint à embrasser les confins de la vieille Europe plutôt que de boire la tisane des sémiologues.
Emprunté à l’écrivain François Bon*:
«… Vazzoler le sait bien, qui va jusqu’où la langue de Gogol et de Boulgakov l’entraîne, pour photographier les mêmes yeux comme la signature d’une perpétuelle quête du proche, d’un même doute, où le statut du corps serait la part visible de notre condition d’humain sous le ciel «.
Ces corps, ceux des filles qui se vendent ou des infirmes, ces silhouettes dont un supplément d’âme filtre, notre société policée, de fait, les classe hors la norme avec l’ivraie, toute compassion qu’ils lui inspirent.
Notre jugement formé par le prisme des médias, par la publicité qui dicte ses normes, nous ne saurions alors tenir l’exception, l’anomalie pour objet du désir. Et pourtant... La dignité saine et sauve